Extraits faiblement commentés du texte de 1983 de la COPREM :

Calcul Numérique
in
"Contribution à l'enseignement mathématique contemporain :
Analyse des contenus, méthodes, progressions, relatifs aux principaux thèmes des programmes : La proportionnalité / Le calcul numérique"
MEN CRDP Strasbourg. Dépôt légal 1987
*

(avec seulement quelques remarques de ma part, au vu de la taille du texte et du salmigondis présenté : mes remarques entre [] )


1. LA PLACE DU CALCUL NUMÉRIQUE DANS LA VIE ET DANS L'ENSEIGNEMENT MATHÉMATIQUE

1.1. Calcul au quotidien
1.2. Calcul scientifique et technique
1.3. Imaginer les problèmes actuels
1.4. Un paradoxe: le recul du calcul numérique dans l'enseignement général
1.5. Nécessités de la formation des professeurs
1.6. Quelques transformations qu'introduiront les calculatrices
2. L'ENSEIGNEMENT DU CALCUL NUMÉRIQUE
2.1. Généralités
2.2. Présentation des premières techniques opératoires sur les entiers
2.3. Enchaînements d'opérations
2.4. Une question délicate : la division
/
2.8. Quelques indications de progression et d'évaluation
2.9. En guise de conclusion


LE CALCUL NUMÉRIQUE


[Note liminaire : le texte de la commission semble être le résultat d'un compromis, ce qui rend particulièrement difficile l'analyse de la problématique sous-jacente qui semble multiple, tâche indispensable si l'on ne veut pas se limiter à une analyse partielle ; d'autre part, je me suis concentré sur les aspects essentiels]
 

1. LA PLACE DU CALCUL NUMÉRIQUE DANS LA VIE ET DANS L'ENSEIGNEMENT MATHÉMATIQUE

1.1. Calcul au quotidien

En tout lieu où effectuer des calculs est une activité courante (magasin, banque, entreprise, administration, on trouve des machines à calculer. On pourrait dire qu'aujourd'hui, là où il y a calcul, il y a calculatrice.

[En tout lieu où il faut aujourd'hui se déplacer, on trouve des trains, des voitures et des avions. Questions :
- Faut-il apprendre à marcher ?
- Pourquoi fait-on du jogging, cette activité idiote qui consiste à aller – souvent le plus vite possible – vers un endroit où l'on a rien à faire pour en repartir également le plus rapidement possible pour revenir au point de départ ?
- Quelles sont la cause de la mise en place massive de cette activité à priori aberrante par un nombre considérable d'êtres humains ?]

Pour notre part, demandons-nous où et quand, dans quelles circonstances, nous avons pour la dernière fois eu à effectuer une multiplication ou une division "à la main", en dehors d'une situation d'enseignement

[Demandons-nous également dans quelles circonstances nous avons fait trois kilomètres à pied, la marche étant la forme d'apprentissage du déplacement, à part pour entretenir notre corps ?]

 D'un autre côté, comparons avec toutes les situations courantes où le calcul numérique tient une place, ou aurait lieu d'en tenir une: décisions d'achat entre plusieurs objets, produits ou services, choix entre plusieurs modalités d'emprunt ou au contraire d'investissement, évaluations diverses (pour du jardinage, du bricolage, de la couture ou du tricot, des recettes de cuisine avec les fournitures correspondantes, des prévisions de dépense d'électricité, gaz, .). Si c'est une question de gestion professionnelle qui se présente, que ce soit dans le monde de l'agriculture, de l'artisanat, du commerce ou de l'entreprise, alors le calcul numérique s'impose comme une absolue nécessité.

[S'il s'agit de commerce, il est absolument indispensable de communiquer, et le plus rapidement possible, avec des gens situés à des distances variables de nous et l'utilisation des automates qui permettent ce rapprochement (moyens de transport des individus et moyens de communications) "s'impose comme une absolue nécessité". On en déduit quoi pour l'apprentissage de la marche chez l'enfant ?]

Au quinzième siècle, savoir faire une division donnait le pouvoir. Dans l'école de Jules Ferry, il y a un siècle, c'était sans doute une promotion sociale de savoir bien calculer (ce qui voulait dire faire des opérations sans faute).

[Autrement dit, ce qui intéresse la COPREM dans la maîtrise du calcul, c'est la possibilité d'avoir du pouvoir ou une promotion sociale. Apprends ce qui te rapporte, mon petit. Qui a dit que l'enseignement poursuivait des buts désintéressés ? Si ce n'est pas le cas, on se demande très sincèrement ce que viennent faire à cet endroit ces remarques.
Il est assez intéressant d'observer que ce sont les membres de la COPREM, qui sont justement arrivés à avoir "du pouvoir" sur les autres enseignants et le fonctionnement de l'école qui affirment que l'intérêt du calcul est le pouvoir. Ont-ils continué à calculer pour rester au pouvoir ? Le texte de la COPREM est-il un texte de calculateurs ?]

Aujourd'hui, ce qu'il faut, c'est savoir organiser des données pour pouvoir les traiter, organiser des calculs et les effectuer le plus efficacement possible à l'aide des machines dont on dispose, avoir des moyens de vérifier les résultats, être capable de déterminer rapidement (ce qui ne signifie pas forcément sans papier ni crayon) l'ordre de grandeur d'un résultat ou d'une approximation. On remarquera que toutes ces connaissances et tous ces "savoir-penser" n'ont que peu à voir avec la bonne exécution à la main des techniques opératoires traditionnelles [Ça se prouve, ce genre d'affirmations si on a un minimum de sérieux]. Mais, en définitive, les machines ne font qu'amplifier une nécessité d'organisation. Sans les calculatrices, tout calcul non élémentaire demandait déjà une organisation, que ce soit pour permettre l'exécution ou pour la contrôler.

[Questions à débattre :
1) " Aujourd'hui, ce qu'il faut" : pour avoir du pouvoir et une promotion sociale ? La position de la COPREM représente l'intersection –  terme destiné à être compris par les formalistes –  entre

- la position "de droite" : seule l'élite – nous – doit avoir le pouvoir
- la position "de gauche" : l'enseignement doit favoriser "les meilleurs " – la promotion sociale – qui doivent avoir le pouvoir
Dans les deux cas :
- la majorité, celle qui n'a pas ou n'est pas destinée à avoir le pouvoir – et elle doit exister car autrement il n'y aurait pas d'existence possible du pouvoir qui n'aurait pas d'objet sur lequel s'exercer – peut aller se faire voir ailleurs bien que l'on prétende "s'intéresser à tous" et particulèrement aux "déshérités"
- la conception des maths et de l'enseignement des maths est déterminée non par une compréhension historique du développement des mathématiques – c'est-à-dire également par le fait que le processus d'exposition d'une théorie représente un renversement temporel et dans l'ordre d'exposition du processus de découverte de cette théorie et par l'autre fait, tout aussi important, que la progression dans la connaissance mathématique de l'élève n'est ni l'un ni l'autre de ces deux processus, mais par
- les "maths vivantes" qui n'en sont qu'une forme très réduite à leur utilisation actuelle, dont la compréhension suppose, au contraire, la compréhension de ce qui les a produites et qui sont des maths "actuellement non vivantes"
- les nécessités de la promotion sociale


2) Ceci se précise puisque les compétences demandées (ordre de grandeur d'un résultat ou approximation) sont des compétences qui sont tout à fait compatibles avec la vision statisticienne et managériale des mathématiques mais laisse de coté tout le calcul qui ne correspond pas à cette conception (l'arithmétique par exemple). Une question de fond à se poser est de déterminer avec précision ce que sont les particularités d'une conception managériale des mathématiques

3) L'ensemble des réformes depuis les années 60 a prétendu avoir comme objectif la réduction des inégalités sociales en arguant de différents arguments aussi faux les uns que les autres

- les mathématiques modernes ne devaient pas être sélectives car elles représentaient un "langage universel" : on s'est aperçu que, outre leur inefficacité en tant que technique, elles remplaçaient le latin dans la sélection

- la vague suivante s'est présentée comme présentant des mathématiques concrètes et pratiques puisque les ouvriers avaient le "sens pratique" : on s'est aperçu que cette conception ouvriériste – et insultante pour cette catégorie sociale – et praticiste favorisait encore plus la sélection

Il serait peut-être temps d'abandonner la détermination de l'apprentissage des fondamentaux par des considérations jésuites et de considérer que l'apprentissage de la division est l'apprentissage de la division : en suivant ce genre de sornettes, on pourrait faire une thèse pour savoir comment apprendre la division à une victime profonde de l'acoolisme avec 6 g. dans le sang ce qui est un objectif souhaitable et huaminitaire car personne ne peut prétendre qu'il ne faut pas que les alcooliques sachent diviser]
 

1.2. Calcul scientifique et technique
 

On imagine difficilement un ingénieur dépourvu de calculatrice.

[Il est vrai que la COPREM manque d'imagination. Mais les ingénieurs avaient, avant, des règles à calcul – c'est-à-dire des calculatrices non électroniques – et des tables de log. Si la COPREM voulait bien préciser sa pensée, elle devrait nous préciser ce que l'existence des calculettes électroniques introduit comme différence avec les calculettes non électroniques pour les "ingénieurs". Pour les élèves du primaire, la différence est simple : ils ne pouvaient pas utiliser la règle à calcul car il faut savoir calculer pour se servir d'une règle à calcul tandis que l'on en a justement pas besoin pour se servir des Casio.]

Ce qui compte pour lui, face à une question, est de disposer d'un programme de calcul. S'il en existe un tout préparé, aucun problème ; sinon, il faudra en adapter ou en créer un.
Dans un laboratoire de recherches, la situation est à cet égard la même : aujourd'hui, calculer c'est élaborer des programmes de calcul, des algorithmes ; l'exécution des calculs est une phase "mécanique", dont l'intérêt est de fournir des réponses ou des retours alimentant la réflexion.
Le calcul numérique lui-même fait appel actuellement à des concepts mathématiques d'un niveau souvent élevé. Un examen attentif du développement des idées met en évidence que le calcul des probabilités, dont un exemple d'emploi est cité plus loin à propos de simples opérations arithmétiques à la machine, est né au 17ème siècle pour des raisons liées aux traitements numériques : des considérations sur des jeux ont servi de support privilégié à la réflexion, mais c'est en fait la volonté de traiter des résultats numériques entachés d'incertitude qui a été le moteur du changement de pensée. Auparavant d’ailleurs, on parlait d'erreur et non d'incertitude à propos de valeurs expérimentales : c'est Galilée qui écrivit le premier que les erreurs dans les mesures sont inévitables, ce qui amena à l'idée d'incertitude. De nos jours, les probabilités, qui sont devenues une théorie depuis Bernoulli, interviennent dans l'expression même des résultats scientifiques : ceux-ci sont fournis moyennant un seuil de risque indiqué.
En mathématique, les études proprement numériques sont associées à des considérations algébriques avancées. Ce qui est moins connu, c'est que le calcul pur, à l'aide d'ordinateurs éventuellement très puissants, suscite de multiples réflexions théoriques. Dans un article (avril 1984) de la Gazette des Mathématiciens, article dont une très grande partie est tout à fait accessible aux non-spécialistes, J. VIGNES traite de la précision des opérations arithmétiques sur ordinateur : à propos d'une situation aussi simple, on fait appel à la loi de Student bien connue des probabilistes, pour savoir si les résultats que l'on obtient sont dignes de foi. Que l'on se rassure cependant : il n'est pas question d'introduire cette loi dans l'enseignement élémentaire pour vérifier les premières multiplications...

[mais il faut causer de tout ça, qui fait savant, pour justifier que "aujourd'hui calculer, c'est élaborer des programmes de calcul" : activité dont la nécessité va être transposée telle quelle de "besoin de la société" – mais il y aurait peut-être à discuter le sujet – en tant que nécessité fondamentale de l'apprentissage des mathématiques, y compris dans les phases premières de cet apprentissage au primaire]

Il est en tout cas tout à fait légitime de souligner que l'usage des machines, bien loin de détruire l'intérêt des questions numériques, leur a donné au contraire une formidable impulsion.

[Baratin intéressant mais baratin par rapport au problème fondamental qui est l'utilisation de la calculette dans les formes fondamentales d'apprentissage : mais ça sert tout de même à présenter l'objet comme intéressant, ce qu'il est d'ailleurs sans contestation possible]

1.3. Imaginer les problèmes actuels
 

Les problèmes, les questions sont l'aliment naturel de la réflexion mathématique.

[N'étant pas moderniste, j'ai eu des discussions passionnantes sur des cours de mes professeurs – c'est-à-dire des cours magistraux, celui de M. Riss** à la fac de Bordeaux – et pire encore sur des cours écrits, pire car les cours écrits ne sont pas "vivants", – les cours de Godement chez Hermann par exemple où le cours de Math Spé de Géométrie dans l'espace de Niewenglowski 1899 – : ce qui signifie que "les problèmes, les questions" ne sont que l'aspect technique de la réflexion mathématique sur laquelle se concentre la COPREM . Celle-ci pourrait répondre qu'il est logique qu'elle parle du calcul dans un texte sur le calcul, mais dans ce cas, elle aurait quand même dû écrire "un des aliments naturels, et pas le plus important, de la réflexion mathématique". On peut même dire que "si on comprend vraiment un phénomène physique, on peut prévoir comment il va se dérouler dans des circonstances données, sans résoudre aucune équation, autrement dit sans mathématiques " comme le dit F. Lurçat in "Autorité de la Science - p.170 " où il cite R.P. Feynmann ("The Feynmann Lectures on Physics" 1964 Addison Wesley, Reading, Mass Vol 1). Je sais que cette position peut paraître aberrante à tous ceux qui ne peuvent se passer de tableaux statistiques pour "évaluer une pratique", activité qui nécessite justement une calculette ou un ordinateur: L'explication est qu'il n'ont pas vraiment compris, et même qu'ils n'ont rien compris, et que les prothèses électroniques et statistiques leur servent à faire croire qu'ils ont compris. Dans le cas qui nous intéresse ici, il s'agit d'introduire aussi le situationnisme mathématique des situations-problèmes.

** aux modernistes de l'époque qui voulaient que les élèves de TS atteignent le niveau "des maths vivantes" de 1970, il répondait qu'il serait très heureux si, non pas les élèves de TS, mais les chercheurs en mathématiques avaient le niveau des mathématiciens de 1830.]

Or les calculatrices permettent, à tous les niveaux scolaires, d'envisager des problèmes sans rencontrer les obstacles préalables que constituent les risques d'erreur ou la durée des traitements. On trouvera de nombreux exemples dans la deuxième partie de ce texte, dont l'objectif est de fournir quelques indications précises pour l’enseignement et des pistes de réflexion à explorer. Par ailleurs, il vaut la peine de signaler dès maintenant, sans entrer dans les détails, à l'intention de ceux qui croiraient que l'utilisation des calculatrices évite de penser, que

1) la gestion des nombres par une calculatrice ne peut pas être exempte de défauts mathématiques,
2) l'enchaînement des calculs sur machine ne peut pas suivre toutes les règles d'écriture du symbolisme mathématique usuel.

Il résulte de ces considérations que les calculatrices sont à la fois des outils qui permettent l'exploration de questions que l'on aurait autrefois rejetées, et des outils dont le bon usage soulève des questions qu'il faut à présent étudier. Dans les faits, il risque de s'introduire peut-être plus de questions qu'il n'y en a à éliminer...
Pour l'un et l'autre des deux types de questions évoqués, il y a lieu de rechercher

[si l'on a décidé à priori que, tous les facteurs ayant été pesés, il faut introduire les calculatrices à l'école dans les phases d'apprentissage du calcul ; sinon, "il n'y a pas lieu"]

des problèmes adaptés aux divers niveaux scolaires et aux divers secteurs d'enseignement. En effet, le cadre numérique est, en compagnie du cadre géométrique, un "acteur-ressource"- [ Sont-ce des guillemets destinés à dissimuler le caractère mercantile de ce vocable?] d'une importance considérable pour les acquisitions conceptuelles.
 

1.4. Un paradoxe : le recul du calcul numérique dans l'enseignement général

Les calculatrices de poche se sont répandues rapidement dans tous les domaines où le calcul numérique est nécessaire (en particulier dans l'enseignement commercial
[On savait que le commerce était le moteur de la vente des calculettes, les mathématiques commerciales seraient-elles le vecteur de leur utilisation dans l'enseignement?  Mais je ne suis pas un ennemi du commerce en tout temps et en tout lieu car l'on doit justement au commerce la mise au point de la division à la française que je défends ici même. Mais on en était "aux années fric" ou tout le monde devait "créer son entreprise"]
mais leur emploi suscite auprès de nombreux enseignants de mathématique une grande réticence : "Les enfants doivent d'abord calculer à la main avant d'être autorisés à utiliser une calculatrice...", "Les élèves de sixième ne savent même plus leur table de multiplication, alors les calculatrices...".

[Ceci prouve donc que la COPREM n'ignorait pas qu'il y avait comme une réticence. Elle va donc contrer ces arguments malheureux...]

Le sondage auprès d'élèves des classes de quatrième et troisième des collèges en 1984 montre qu'en effet plus de 90 % ont la possibilité de disposer d'une calculatrice mais que moins de 10 % ont appris à s'en servir dans le cadre de l'enseignement.

[A des gens qui disent que la calculatrice risque de faire baisser le niveau en calcul des élèves, la COPREM répond sans broncher que "90% des élèves en ont ". Hors Sujet : Zéro pointé]

Ne parlons pas des cas rarissimes où des conseils à l'achat ont été donnés par des professeurs (alors que les manuels scolaires qui sont peut-être aussi pernicieux dans leur genre que les calculatrices –  puisqu'ils évitent l'effort de tout apprendre par coeur –

[Les gros imbéciles sont obligés de caricaturer les positions de leurs opposants pour les combattre : cela prouve simplement leur impuissance. En effet en 85, personne ne proposait de "tout" savoir par coeur mais des enseignants, qui avaient raison contre la COPREM, disaient fort justement qu'il ne fallait pas abandonner les exercices de mémorisation]

sont les mêmes dans toutes les classes d'un même établissement)... Anarchie dans le choix des modèles et comportements autodidactes généralisé, avec les défauts inhérents, telle est donc la situation de fait dans la grande majorité des classes en ce qui concerne l'usage des calculatrices. On peut s'interroger sur les causes de cette méfiance vis-à-vis des calculatrices. Pour certains professeurs, "les élèves deviennent des assistés tributaires d'une machine pour faire le moindre calcul".

[On en rediscute, dix sept ans après ?]

Pour d'autres, "la calculatrice dispense de tout effort et permet d'arriver trop vite au résultat". Mais le peu d'emploi qui est fait en classe de mathématique n'est-il pas en définitive lié, pour une bonne part, à la faible place faite au calcul numérique ?

[Oh que Oui : mais qui a introduit les maths modernes qui ont séparé l'apprentissage de la numération de celles des opérations, qui ont séparé l'apprentissage de chaque opération des autres opérations, faisant ainsi monter le niveau en calcul ?]

On trouve des exemples de cette désaffection : dans les épreuves de mathématique de l’ex-BEPC et du baccalauréat, qui ne proposent guère d'autre calcul qu'algébrique, dans les épreuves de mathématique des examens de l'enseignement technique même (CAP, BEP, BP). Pour ces derniers examens, le calcul numérique n'est pas absent (factures, devis, ...) mais les données proposées sont choisies pour permettre des calculs rapides et pour aboutir à des résultats " qui tombent juste ". Où est le réel ?

[Disons le tout de suite : une "réelle" situation "réelle" est inutilisable dans une situation d'apprentissage des fondamentaux. Pour étudier la notion d'aire en primaire, il n'est pas possible de commencer à étudier la surface (!!!) des chaussures du président de la COPREM. Et les problèmes d'arithmétiques, qui n'étaient pas vivants, étaient justement utiles...]

La désaffection vis-à-vis du calcul numérique est en définitive facile à comprendre, à partir de la situation "d'avant les machines". En effet, la scolarité commençait par l'apprentissage des quatre opérations arithmétiques. Ensuite, on passait à une phase d'apprentissage du calcul littéral ("l'algèbre"). Il fallait attendre les dernières années de lycée pour avoir les connaissances permettant d'utiliser la règle à calcul et la table de logarithmes.
L'utilisation des machines rendit obsolète celle des instruments précités, ainsi que le savoir correspondant : les anciens problèmes de calcul du niveau terminal des lycées ne sont effectivement que des opérations de pure routine pour l'utilisateur d'une calculatrice scientifique.
De ce fait, et compte tenu de la nécessité d'introduire des notions nouvelles au niveau des lycées (intégration, nombres complexes par exemple), la suppression quasi-complète du calcul numérique s'est produite "naturellement", sans bruit ni protestations.
 

1.5. Nécessités de la formation des professeurs

On ne peut espérer que soient mises en oeuvre de façon efficace dans l'enseignement mathématique des idées qui nécessitent des changements non négligeables d'habitudes intellectuelles, par de simples modifications de programmes ou d'instructions d'accompagnement des programmes. Dans bon nombre de cas, il se trouve que de telles modifications ne seraient même pas nécessaires.

En revanche, si l'on veut que l'enseignement mathématique ne marche pas à côté des problèmes de l'existence quotidienne et de l'évolution scientifique et technique,

[répétons le une fois pour toutes : les enseignements de base DOIVENT marcher à coté du "progrès" car ils doivent en être indépendants ; ils le peuvent, en s'appuyant sur la tradition]

un vigoureux effort de formation est à entreprendre auprès des professeurs actuels et futurs, dans la lignée de celui qui avait conduit en son temps à la création des IREM’s.

[Si mes souvenirs sont exacts, les IREM ont été mis en place pour accompagner la mise en place de la réforme des maths modernes. Je ne m'en vanterais pas]
 

Les principes alors mis en vigueur seraient valables aujourd'hui encore,

[Puisque je prétends à longueur de ligne que la "New New Math Reform" n'échappe pas à la problématique des maths modernes si ce n'est de manière moderne, c'est-à-dire formelle, je suis assez heureux que la COPREM se réclame de ce qui a été fait à l'époque où Dieudonné (excellent technicien de sa matière au demeurant) clamait "A bas Euclide", ce qui est une vraie connerie et dont il ne s'excuse cependant pas dans son livre intitulé cependant : "Pour l'honneur de l'esprit humain".
Or l'enjeu est important: en effet, la géométrie euclidienne – avec les débuts d'apprentissage de la démonstration – est la géométrie qui représente le mieux (au sens de la représentation directe et des facilités de développer l'étude de la géométrie) l'espace géométrique usuel entourant immédiatement l'observateur : dire " A bas Euclide" et supprimer les cas d'égalité des triangles et introduire à la place les groupes de transformation –  erreur sur laquelle nous ne sommes pas revenus –  est donc une aberration. L'argument des modernistes –  ceux qui nous imposent encore de ne pas utiliser les cas d'égalités des triangles et au contraire d'utiliser des symétries pour faire des démonstrations, ce qui est infaisable en phase d'apprentissage –  était de prendre comme modèle des progressions pédagogique la logique de la structure des groupes de transformation et de considérer que cette optique était bien réelle puisque la physique – c'est-à-dire la "réalité" pour eux – utilisait des géométrie non euclidiennes. Cette suite de déductions aussi stupides les unes que les autres a abouti notamment à une géométrie sans figure mais il y a un hic dans le raisonnement : Niels Bohr, qui utilisait des "géométries non euclidiennes" considérait que c'était la compréhension de la géométrie euclidienne qui ouvrait la porte de la compréhension des géométries non-euclidiennes (Conversations personnelles avec François Lurçat). Car il se trouve bêtement que la compréhension dont il s'agit n'est pas "la compréhension en général" mais la compréhension par des êtres humains]
 

alors même que l'enjeu est différent,

[Même principe et enjeu différent : ça, c'est de la cohérence. Attention, cette outrance anti-moderniste est un piège pour ceux qui veulent combattre cette outrance... d'un point de vue moderniste]

mais tout aussi important :

[et formulé dans le même langage que l'appel aux maths vivantes de la réforme précédente : avant il fallait faire des maths modernes parce que c'était les maths vivantes de l'époque ; maintenant il faut faire des maths informatisées parce que cela correspond aux maths vivantes actuelles. Et si on parlait des "maths scolaires" tant honnies par S. Gasquet et d'autres. Mais si ces gens veulent s'attaquer aux maths qui sont pratiquées actuellement dans l'EN, qu'ils disent que ces maths là sont le résultat des réformes qui voulaient opposer aux maths scolaires des "mathématiques vivantes"; et s'ils veulent s'attaquer aux maths scolaires, qu'ils s'attaquent au contenu et aux méthodes du primaire des années 1890/1930 en les connaissant et sans les déformer : sur cette base, je veux bien discuter des défauts des maths scolaires de cette époque et notamment des positions de Claude Laisant, mathématicien membre de l'Ecole Émancipée des années 1900 qui critiquait les vraies maths scolaires, celles de son époque]
 

à l'âge de l'informatique, [ Aïe!] les mathématiques ont retrouvé un aspect expérimental,

[Qui le leur avait fait perdre dans l'enseignement ? Je ne connais pas tous les responsables individuellement – la responsabilité est sociale – mais tous les membres de la COPREM en ont été des acteurs et sont donc responsables : aucun ministre n'a eu l'idée de convoquer René THOM pour faire partie de cet organisme. Serait-ce parce qu'il n'était pas un assez bon mathématicien ?]

sans perdre l'autonomie

[Ouf ! "L'honneur de l'esprit humain" est sauvegardé et l'autonomie d'entreprise des maths est préservée. Il n'y a pas "d'autonomie" des mathématiques. Il y a ce que le professeur Wu Hu appelle la "mathematical closure" d'un problème mais le fait de penser cette réalité en terme d'autonomie empêche justement de penser
1) la liaison math/"physique" au sens large puisque l'on proclame l'indépendance absolue du développement des mathématiques – ce qui est bien la philosophie formaliste des "Maths Modernes"
2) la cohérence interne des mathématiques qui est réelle même si elle n'est absolue – et l'on retombe ainsi dans l'empirisme le plus plat.
Mais cette position de Wu Hu n'est possible pour lui que parce qu' il s'appuie sur une tradition qui, avec Polya et Weyl en 1962, signait un appel contre les "maths modernes", ce qui lui a permis ensuite de ne pas tomber dans la critique moderniste des maths modernes]
 

qu'elles avaient acquise en se dégageant des références physiques.

[Re Ouf! On aurait pu croire positif le fait que, pendant plus de 2000 ans, les mathématiciens étaient aussi des ingénieurs, des philosophes; la COPREM nous apprend que ce ne l'était pas et qu'il vaut mieux être un spécialiste. Ce jugement de ma part ne mésestime pas le fait qu'il est difficile, au vu de la structuration actuelle du développement des connaissances, de ne pas se comporter comme un spécialiste et qu'il faut donc faire un effort en ce sens, le courant portant spontanément à la spécialisation bornée : mais il existe des exceptions qui naviguent contre le courant. Ni René THOM, ni François Lurçat ne se comportent comme des spécialistes. La COPREM au contraire se réjouit de pouvoir jouer seule dans la cour. Ceci n'est pas indépendant du fait, pour en revenir au "dégagement des références physiques", que les IG de maths et de physique, chacune vantant l'autonomie de leurs ouailles –  qui le plus souvent les méprisent tout en les craignant pour l'avancement mais en les soutenant par corporatisme de matière ** –, ne sont jamais arrivés à avoir une progression cohérente pour les élèves
** le spectacle de profs de physique se réjouissants du soutien de leur IG pour défendre "La Physique" et ses horaires tout en disant que l'enseignement réel de la physique réelle –  c'est-à-dire sans majuscule – est anti-physique et impossible à réaliser, a quelque chose d'affligeant surtout lorsque ce discours contradictoire vise à la défense des postes, activité honorable sauf lorsqu'elle se présente pour autre chose que ce qu'elle est. Vais-je passer pour un matheux ennemi des physiciens ?]

Autrement dit, les concrétisations,
[Le réel serait-il la concrétisation des mathématiques ?]

les retours lors de mises en oeuvre effectives ont aujourd'hui un rôle à jouer dans la réflexion mathématique ; ce ne sont pas que des "applications", mais des pièces constitutives des études entreprises.
Quelques indications générales à propos d'un domaine précis : la géométrie, mettent bien en lumière l'évolution indiquée. On peut dire de la géométrie qu'elle a été la première théorie physique.

[On pourrait dire aussi que mesurer la terre est une activité physique et que les mathématiques en ce sens étaient une activité physique. Je n'entame pas le débat mais souligne l'unilatéralisme de la COPREM qui tient à garder autonome son jardin mathématique. Mais lorsqu'on autonomise de manière absolue un domaine de l'activité humaine en le séparant absolument des autres, on induit une forme de pensée qui est capable d'autonomiser tous les domaines de la pensée et de les opposer aux autres : et c'est bien ce que la COPREM fait lorsqu'elle oppose le calcul à la main et le sens du calcul, la numération et les opérations, les opérations entre elles, etc. Il n'en demeure pas moins que tout le programme de géométrie –  euclidienne faut-il le dire – jusqu'au collège et même en lycée est entièrement inclus en tant que théorie dans la physique (Einstein), ce dont il faudra bien un jour tenir compte. Vais-je passer, ce coup-ci, – pour ceux qui ont une vision corporatiste et qui ont cru quelques lignes plus haut que j'étais un ennemi des physiciens – pour un matheux vendu aux physiciens ?]

Puis elle s'est libérée de toute considération à l'environnement,

[Environnement : concept bizarre qui désigne n'importe quoi et permet de faire passer la pilule suivante]

au point que l'on a pu rencontrer des livres de géométrie entièrement dépourvus de figures .

[Il serait "honnête pour l'esprit humain" que ceux qui ont poussé à ce genre d'âneries ne considèrent pas ce fait comme un "fait scientifique", c'est-à-dire "strictement objectif", mais incorporent dans le bilan leur propre responsabilité. Car, il y a vingt ans et plus, j'ai connu ces mêmes personnes, pleines de morgue formaliste et de références incompréhensibles au constructivisme et je tiens particulièrement à ce que ce texte ne soit pas considéré comme un texte universitaire et impersonnel car les décisions prises ont des conséquences sur des êtres vivants : il s'agit donc de défendre les élèves qui ont sont les êtres vivants et ont été les premières victimes de ces décisions : or le jeune enfant, avide connaissance, n'est pas un rat sur lequel on fait des expérimentations]

Actuellement, le souci de visualisation sur écran d'ordinateur ou sur table traçante conduit à incorporer à la réflexion divers aspects, notamment numériques, liés à des problèmes de représentation (questions de "fenêtre" de représentation et d'échelle bien sûr, mais aussi questions plus théoriques, de paramétrages par exemple).

[Position étrange pour des gens qui théorisent l'autonomie des maths quelques lignes plus haut. La conception autonome de la géométrie pour la COPREM se réduit à : "On suit le mouvement", ou "Laissez faire". Et l'on n'a pas à aller chercher très loin l'idéologie libérale dans l'enseignement]

Une gestion des conséquences, dans l'enseignement des mathématiques, du phénomène d'évolution qui vient d'être sommairement décrit, ne peut être maîtrisée que si elle est envisagée dans le cadre d'actions de formation-innovation [Tout nouveau, tout beau]. Afin de préciser, on peut passer en revue les transformations que l'usage des calculatrices va introduire, sans même parler des ordinateurs: l'élément-clé, commun aux diverses machines, est l'idée de recours à un outil en mathématique.

[L'élément clé serait plutôt que les mathématiques sont un outil, ce qui ne les empêche d'être une conception théorique que chez ceux qui opposent dans l'absolu l'outil et la théorie]

1.6. Quelques transformations qu'introduiront les calculatrices

Dans l'enseignement actuel, les calculatrices, sans ajouter de nouveaux contenus, peuvent permettre d'aborder différemment certains points des programmes : techniques opératoires, propriétés des opérations, décodage des formules et règles de priorité. Elles peuvent permettre également de débloquer des élèves chez qui l'échec en mathématique est dû aux difficiles d'assimilation des algorithmes d'opérations (on constate chez certains élèves ou adultes un regain d'intérêt pour le calcul à la main après un emploi libre de la calculatrice ; ceci correspond à l'accès à l'idée de limitations des possibilités de la calculatrice, idée qui doit pouvoir elle-même être exploitée dans une étape d'acquisition ultérieure, sur laquelle la deuxième partie de ce texte reviendra).
Les calculatrices peuvent contribuer à l'évolution des démarches de l'enseignement mathématique par l'introduction de nouveaux types de solutions des problèmes, par l'importance donnée au calcul mental

[Souligné par moi. Ils l'on dit, en séparant le calcul mental du calcul écrit : plus de 15 ans après, on fait un bilan ? Et pas en disant, comme au moment du bilan des maths modernes partagé par les membres de la COPREM qui écrivent ce texte, que l'on est surpris par les "effets pervers" et non prévus de la réforme]

et au calcul des ordres de grandeur, par l'utilisation des puissances de dix pour écrire les grands nombres, par la réflexion sur la précision des calculs obtenus après l'emploi de valeurs approchées intermédiaires. Les calculatrices peuvent contribuer à l'évolution des méthodes pédagogiques employées comme source d'investigation, comme moyen d'afficher de nouveaux nombres, comme outil utilisé pour des essais multiples ou des calculs répétitifs, comme moyen de vérification de calculs par une autre méthode puisque l'accès à un résultat est rapide.
Les calculatrices permettent de travailler à partir de situations réelles, avec des résultats expérimentaux, des résultats statistiques... Il est ainsi possible, avec cet outil, de proposer aux élèves de véritables activités interdisciplinaires.

[Je propose : mesurer les crânes des élèves pour en déduire des résultats scientifiques sur leurs capacités cognitives. Dans la mesure où le "sens des mathématiques" est interne aux mathématiques, un "vrai" mathématicien approuve et n'a rien à redire sur le sujet. Lire "La mal mesure de l'homme" de S. Jay-Gould. Il faut dire que les dernières publications "scientifiques" qui cherchent à trouver l'origine de la découverte par Einstein de la relativité dans des particularités physiques de son bulbe sont de la même eau]

Il faudrait cependant se garder de voir dans l'utilisation des calculatrices "la solution" aux difficultés que l'enseignement peut rencontrer : simplement, il est vain de continuer dans les faits à proposer des activités qui ne tiennent pas compte de l'existence, de nos jours banale, d'outils de calculs performants. Mais il ne faut pas non plus se cacher l'ampleur des transformations impliquées par cette existence : c'est la totalité de l'enseignement du calcul numérique qui est à envisager, et pas seulement la meilleure manière de se servir de calculatrices. C'est le but que poursuit la seconde partie de ce texte, sans qu'il soit possible actuellement de méconnaître son caractère encore incomplet et provisoire. Seules les innovations qui seront tentées seront à même de lui conférer la rassurante solidité exigible pour sa mise en pratique.

[Autrement dit, les apprentis sorciers assurent la solidité sur quelque chose qui n'existe pas et qui fait partie des futures innovations.]
 
 

2. l'enseignement DU CALCUL NUMÉRIQUE

2.1. Généralités

Il serait illusoire de ne traiter que de l'un des aspects du calcul numérique : son enseignement est à envisager globalement. Le présent texte fait mention de calculatrices, mais en les incorporant à une démarche d'enseignement dans laquelle calcul mental et calcul à la main, avec papier et crayon, ont tout autant d'importance que le calcul-machine.
Ceci posé, il convient de rappeler ici que les nombres et leurs opérations "s'incarnent" souvent, en représentant des quantités ou des grandeurs qui interviennent dans une situation à traiter.

[Même avec des guillemets, ils ont écrit "s'incarnent" : serait-ce la réincarnation ?
Ils ont écrit, de plus, "souvent" : ceci doit signifier que lorsque l'on entre dans "l'activité purement mathématique", gadget prêt-à-penser qu'un inspecteur doit avoir à la bouche comme un cadre moderne doit avoir un portable, les nombres et les opérations ne s'incarnent plus. Ce qui doit permettre de poser une question supplémentaire : lorsque le DRH compte le nombre de licenciés, s'agit-il d'une "activité purement mathématique" ? Si la réponse est oui, les nombres ne sont plus incarnés dans des hommes et ça apaise la conscience]

Cet aspect, abondamment commenté dans le texte sur la proportionnalité publié par la COPREM, sera moins souligné dans le présent texte. Ceci est possible parce que la phase "calcul" dans un traitement a ses règles propres :

[Ouf ! On est dans des "activités purement mathématiques" et ils vont s'en donner à coeur-joie]

il est par exemple possible de vérifier l'exactitude d'un calcul indépendamment de sa pertinence, de la même façon que l'on peut relire un texte, pour en vérifier l'orthographe, indépendamment du sens.

[Kolossale innovation allant dans le sens du "sens" :
1) et l'on peut ainsi écrire à la place de "J'ai laissé tomber le sceau dans le seau du sot", " J'ai laissé tomber le sot dans le sceau du seau" ou "J'ai laissé tomber le sot dans le sot du sot" ce qui effectivement ne troublera plus beaucoup d'élèves de sixième actuels. Qui peut recommander de vérifier l'orthographe indépendamment du sens, à part pour la dictée de Mérimée qui est effectivement un amusement de débile ou pour le correcteur orthographique de Word ?
2) "il est par exemple possible de vérifier un calcul hors de sa pertinence":  Tout à fait, c'est possible. Et c'est même ce que font la majorité des élèves qui disent " Msieur, la calculette m'a donné 121 pour 11 fois 11. C'est juste?"]

Mais, de même que l'apprentissage de la langue passe par le travail sur des textes, l'apprentissage du calcul passe par la résolution de questions et le traitement de données.

[On se serait attendu à "l'apprentissage du calcul passe par"... la pratique du calcul. Hé bien non ! On a

- "la résolution des questions" : allusion subtile à une critique du cours magistral et au fait que "le savoir ne se transmets pas"
- et le traitement des données.


Autant "la résolution des questions" est une allusion à une optique piagétienne – version Brousseau –, autant le traitement des données fait allusion au "traitement de l'information". Or le "traitement de l'information" est la phase qui succède, dans une avancée dégénérative vers la pensée computarisée, et en pédagogie moderniste et en psychologie scientifique, à "l'approche piagétienne" .Cf "Calcul humain, calcul mental et calculettes : VIII) 1:A tout seigneur tout honneur: "L'Encyclopédia Universalis"

On est donc en milieu connu qui marque

- la faillite d'une conception mathématique de la conception des modèles – je ne parle pas de la faillite commerciale car c'est une réussite commerciale – : il s'agit donc d'une faillite mathématique
- la faillite de la pédagogie moderniste
- la faillite de la psychologie scientifique et du cognitivisme (ces deux dernières faillite étant la faillite de la conception de "l'intelligence" comme isomorphe aux "grandes structures ensemblistes")
Les remarques faites sur la première faillite indiquant qu'il ne s'agit pas d'une faillite commerciale restent valables pour les deux autres faillites. La conjonction des trois faillites, qui peuvent s'appuyer sur une conception scientiste des mathématiques pour s'autojustifier*, – et sur une autonomie de l'esprit par rapport à l'action – explique que le front des abrutisseurs de l'enfance est compact et soudé, surtout si l'on pense à leurs rapports avec les NTIC.

* Cette auto-justification est la forme savante de celle des élèves : "Le résultat est 121 parce que la calculatrice – sous entendu : "qui donne toujours des résultats justes" – l'a dit.
La forme savante est la suivante : après avoir construit un modèle à base de nombres choisis selon la logique du client, client pouvant être un client non purement mercantile dans une société dominée par le mercantilisme et qui s'en vante – modèle qui donne donc déjà le résultat recherché par le client, ou bien il ne sera plus client –, trouver des justifications dans les propriétés "purement mathématiques" du modèle – sous entendu : "parce que les mathématiques sont la science-reine" ou tout simplement "parce que c'est mathématique"]

Cette réserve faite, quant à une complète autonomie du calcul, qui ne serait évidemment pas souhaitable dans l'enseignement,

[Pourrait-on savoir où est souhaitable la "complète autonomie du calcul" ? On sait que le calcul est entièrement autonome dans un ordinateur, que ce soit souhaitable ou non. Il y a un seul moment où la complète autonomie du calcul est justifiée du point de vue humain , mais dont ne peuvent se réclamer les modernistes qui traite cette activité de "dressage", "d'authomatisme" et "d'exercices de virtuosité", c'est la pratique humaine des opérations]

il est presque inutile de souligner la richesse mathématique du calcul numérique, donc l'intérêt que celui-ci peut avoir en soi.

[Mais à condition qu'on ne le fasse pas à la main !]

On peut préciser quelque peu cet intérêt, sans anticiper sur les exemples précis qui seront examinés plus loin, en considérant les situations-problèmes qui amènent à s'appuyer sur le calcul numérique. En effet, l'évolution de l'enseignement des mathématiques donne, en s'appuyant sur les recherches en didactique,

[Aïe ! Quand on est à court d'arguments, on sort le fameux "Les dernières recherches ont prouvé" que les américains de la Silicon Valley connaissent sous le nom de "Reasearch has shown"]

une place prépondérante aux situations-problèmes. Cette place se justifie particulièrement pour :

1) L'approche et la construction de nouvelles notions ou de nouveaux outils mathématiques,
2) Le réinvestissement [ un peu de vocabulaire mercantile donne toujours un ton moderne et de bon aloi] des acquis,
3) Les mises en relation de connaissances acquises séparément, et les synthèses ainsi justifiées.

Les Instructions Officielles de 1980 pour le Cours Moyen mentionnent ces trois directions. En particulier, l'usage des calculatrices ne prend de réel intérêt pédagogique qu'incorporé à une démarche d'enseignement dans laquelle ces préoccupations interviennent effectivement. Dans l'examen plus détaillé entrepris tout au long de la suite de ce texte, cette prise en compte est explicitement indiquée lorsqu'il y a lieu.

[Je reviendrai dans un autre texte sur les situations-problèmes; l'important est de noter que la COPREM dit que les IO vont dans le bon sens et que, même si les 3 conditions énoncées ne sont pas présentes – bien que leurs présences ne changeraient pas grand chose à l'affaire – on encourage cependant l'utilisation des calculatrices. Après, les promoteurs de la réforme diront que la faute en revient à la base... qui n'était pas assez formée]

2.2. Présentation des premières techniques opératoires sur les entiers

La maîtrise parfaite des "quatre opérations" effectuées sur papier n'est plus de nos jours une nécessité absolue en soi, puisque le cas échéant la machine peut jouer un rôle de "prothèse pour le calcul".

[Reprenons l'exemple de la marche et répétons ensemble : la maîtrise parfaite de la marche n'est plus de nos jours une nécessité absolue en soi, puisque le cas échéant les machines (il y en a plusieurs, y compris la chaise d'infirme motorisée) peuvent jouer un rôle de "prothèse pour le transport"]

Il n'est donc pas très important d'atteindre une grande fiabilité dans l'exécution sur papier des opérations: en cas d'urgence, on pourrait se procurer pour une somme modique (quelques paquets de cigarettes) une calculette à la boutique du coin.

[Ne serait-ce le prix encore prohibitif des fauteuils roulants motorisés, il va être possible à tout le monde d'être infirme]

Il est cependant important d'acquérir des méthodes de calcul numérique, et les opérations arithmétiques constituent les premiers exemples systématisés d'algorithmes, c'est-à-dire de suites rigoureusement définies d'opérations élémentaires.

[Ce qui intéresse la COPREM, ce sont les suites d'automatismes, c'est-à-dire ce qui réduit l'intelligence de l'enfant à celle d'un computer]

Par ailleurs, la numération de position s'est imposée parce qu'elle se prête bien aux techniques opératoires (incomparablement mieux que la numération latine par exemple) ; son acquisition va donc de pair avec le fait d'effectuer des opérations.

[Ne mélangeons pas tout :

- l'acquisition de toutes les opérations devrait se faire, pour faciliter la tâche des élèves et leur compréhension, au fur et à mesure de l'acquisition de la numération des entiers: ceci n'est pas la position de la COPREM et était, par contre, la position des progressions antérieures à 1970, position que les membres de la COPREM ont TOUS** combattu à des degrés divers. Ceci fait partie du bilan caché des "maths modernes".** Je n'ai aucune information directe sur le sujet

- la COPREM emploie le mot "donc" qui semble faire référence à la numération de position : ceci signifie que c'est la numération de position qui justifie le fait d'apprendre les opérations. C'est une imbécillité car les opérations, même difficiles à faire, existaient avant l'adoption de la numération de position et le lien qui existe, dans l'histoire des mathématiques entre opérations et numération n'est pas lié exclusivement à la numération de position.]

Élaborer et mettre au point un algorithme est en soi une activité intellectuelle formatrice.

[On va subrepticement, au nom du constructivisme, de l'apprentissage de l'opération comme algorithme à la construction de l'algorithme de cette opération. Or il y a au moins triple faute :
- l'apprentissage d'une opération n'est pas l'apprentissage d'un algorithme : la partie "algorithmique" est l'apprentissage de ce que les progressions anciennes appelaient la pratique de l'opération et qu'elles opposaient au sens de l'opération ; tous les manuels des années 180 à 1970 distinguaient – sous ces noms ce qui fait que les SDE et autres cognitivistes n'ont rien inventé – les deux et l'important, par lequel commençait la leçon, était, par exemple, la leçon sur le sens de la multiplication. Les cognitivistes et les SDE ont remplacé, à partir des années 70, le contenu de la leçon sur le sens par des leçons sur les propriétés de la multiplication (commutativité, associativité, élément neutre, symétrique pour un élément) qui non seulement n'ont pas de sens mais s'opposent à la compréhension du sens de la multiplication.
- la question est de savoir si dans la phase d'apprentissage d'une opération, il faut donner à l'élève n'importe quel algorithme, et même, au nom de la liberté de choix, tous les algorithmes : on a ici l'erreur parallèle à celle de l'apprentissage de la numération dans différentes bases. Le point de vue formel ne permets pas de distinguer, à part pour leurs propriétés mathématiques qui ne sont pas pertinentes dans ce choix – nombre de diviseurs par exemple – quelle est la base dans laquelle il faut apprendre à calculer. Un critère plus pertinent est que nous sommes des êtres humains qui ont un corps physique [les maths modernes niaient également ce fait en prétendant que les maths seraient les mêmes pour les martiens], critère que j'utilise dans mon cours de math de sixième, ce qui prouve que je ne suis pas insensible à la question "des bases" mais à condition de préciser quelle est leur place dans la progression : le travail dans des bases autres que 10 doit être interdit tant que les élèves ne possèdent pas une solide formation à la numération et aux quatre opérations en base 10, et plus particulièrement dans la phase d'apprentissage de la numération. On peut faire le même type d'analyse pour le choix des "algorithmes" de la division : s'en tenir strictement à la division "française" – une fois n'est pas coutume, je suis nationaliste – qui a globalement le plus de sens puisque, à chaque étape de l'algorithme, elle reproduit le sens global de la division ( r = D - d x q) ce que ne font pas les autres divisions (les modernistes ont un goût prononcé pour la division russe qui, basée sur des divisions par 2, permet de mieux transformer le cerveau de l'enfant en machine binaire).
- si l'on ne peut nier en général que "Élaborer et mettre au point un algorithme est en soi une activité intellectuelle formatrice" encore que ce ne soit pas la plus formatrice, y compris pour élaborer et mettre au point d'autres algorithmes, il reste à prouver que c'est "l'élaboration de l'algorithme par l'enfant" qui soit le plus formateur, ce qui suppose, dans le cas de la division, que chaque enfant va être capable de reconstruire l'algorithme de la division française que l'humanité a mis un bon paquet de siècles à réaliser. On a aucun exemple de "suivi pédagogique" réalisant cette ambition, mais l'on a l'exemple du suivi pédagogique de générations entières qui ont tenté cela, qui est irréalisable, et dont le résultat est

1) les élèves ne savent plus faire de divisions
2) les pédagogues qui ont d'abord prétendu que tous les élèves sauraient construire jusqu'à l'algorithme complet de la division classique en sont venus, non pas à remettre en cause les moyens qu'ils recommandaient pour atteindre ce but**, mais à considérer que le but visé était inutile et même néfaste (dressage) ce qui nous amène à la phase actuelle: ne plus faire de dvisions et tout laisser à la machine. En ce sens, le cognitivisme pratique traduit maintenant une adaptatation sans fard aux difficultés apportées historiquement par le cognitivisme théorique.
** En 70, quand il n'y avait pas de calculettes, on n'osait pas affirmer qu'il était inutile de savoir calculer, on affirmait simplement que l'on arriverait au même but et m^me en mieux- par d'autres moyens]

Or, actuellement, l'apprentissage de la numération au CP et les techniques opératoires aux CE et CM sont les seules occasions, dans la plupart des classes, de fabriquer des algorithmes et de les faire fonctionner. d'autres algorithmes pourraient pourtant être utilisés (algorithmes de constructions géométriques par exemple). l'introduction de l'informatique à l'école modifiera sans doute ce fait et ce que nous disons ici n'a qu'une valeur provisoire.

Même si une calculette donne instantanément le résultat d'une multiplication ou d'une division,

[la particularité de la calculette, par rapport à tous les autres procédés mécaniques qui ont la même fonction, y compris le calcul digital, est d'être une boîte noire et de ne donner aucune représentation de ce calcul ; elle gagne donc en vitesse, mais pas en sens.]

on peut se demander, à divers niveaux de la scolarité, suivant les possibilités des enfants comment on pourrait trouver le résultat si on n'avait pas de machine.

[L'élève ne peut se poser cette question que s'il ne sait pas faire une opération à la main ; autrement dit la question n'existe que dans les réflexions brumeuses de la COPREM.
Ce qu'on sait de la situation décrite par la COPREM est que
1) l'élève a une machine
2) il sait que la machine lui donne le résultat
Situation-problème ?]

L'important n'est pas alors d'apprendre une technique mais de trouver un moyen d'obtenir un résultat.

[La meilleure solution est, pour l'élève, d'attraper la machine qui donne, justement, le résultat]

Les instructions officielles actuelles proposent d’ailleurs une approche des techniques opératoires qui va dans ce sens.
Avant d'aboutir à la technique habituelle

[Laquelle ? La vieille habitude qui consiste à poser les opérations ?]

on pourra pour chaque opération envisager d'autres techniques qui peuvent constituer des étapes intermédiaires.

[Au Canada, on envisage toujours, en période d'apprentissage de la numération, d'autres base que la base 10 : mutilent-ils les élèves de trois doigts par main lorsqu'ils les forcent à calculer en base 4 ? Ou la question pédagogique de fond est-elle un problème "purement mathématique" : vaut-il mieux, dans ce cas précis, couper trois doigts par main ou garder une main intacte et supprimer quatre doigts sur l'autre main ?]

Il s'agit en fait de permettre aux enfants de s'approprier, en l'élaborant eux-mêmes, une méthode de calcul qui s'affinera progressivement, et non de leur faire apprendre le mécanisme d'une technique unique.

[Commençons par perdre l'enfant, et sur cette base forte, donnons lui ensuite seulement, pour plus l'embrouiller, la solution qui a été optimisée par la pratique humaine depuis la naissance de l'homme]

Cette phase d'apprentissage ainsi conçue peut être d'une extrême richesse :

[C'est sûr et il est remarquable que l'intelligence des enfants leur permettent, dans un certain nombre de cas, de s'en tirer; mais cette richesse rappelle globalement la diversité des chemins d'un passant perdu dans un labyrinthe : il y en a qui, au hasard, s'en sortent]

elle constitue un lieu privilégié de réinvestissement [A combien % : c'est toujours ce que je demande à ce cas-là à mon banquier, car je sais compter] des notions acquises ou en cours d'acquisition concernant le numérique et plus particulièrement la numération.

En effet, une réflexion, qui remonte maintenant à une vingtaine d'années a conduit à donner autant d'importance à la compréhension du pourquoi des techniques opératoires courantes qu'a leur bonne exécution.

[ENFIN : l'aveu de la continuité entre les maths modernes et la critique moderniste des maths modernes. Mais présentée d'une manière discrète : la COPREM ne va pas dire : "A l'époque où nous soutenions Dieudonné qui disait "A bas Euclide", nous pensions déjà que l'exécution des opérations n'avait pas d'importance". On sait donc que les maths modernes méprisaient les capacités en calcul des enfants et que les théorisations qui aboutissent à une baisse de capacités en calcul datent bien de cette époque là. Avec une différence par rapport à la situation actuelle : les enseignants qui enseignaient en 60-70 avaient les connaissances héritées des progressions antérieures et, même s'ils appliquaient les nouveaux programmes, ils faisaient passer en partie un contenu qui ne se réduisait pas à ce programme. Maintenant, 20/30 ans après, les enseignants, qui sont les élèves de l'époque précédente, n'ont plus ces connaissances, ce qui explique, entre autres car d'autres facteurs comme la limitation des redoublements interviennent, que la baisse relative la plus forte de niveau en calcul s'est manifestée plus tard, à partir des années 85/95.
D'autre part, le chanteur beatnik Tom Lehrer notait déjà en 65 qu'en maths modernes, ce n'était pas le résultat qui était important mais l'idée, et il y a, aux États-Unis une importante bibliographie où des mathématiciens montrent le rapport qui existe entre les réformes actuelles et la période des New Math : le sujet semble tabou en France car les principales tendances pédagogiques ont été parties prenantes des conceptions des années 70 et sont encore empêtrées dans cette problématique tout en croyant l'avoir dépassée]

Il est aujourd'hui intéressant de prolonger cette réflexion en tenant compte de l'existence des outils de calcul actuel.

[Si la COPREM n'avait écrit que cette phrase, ce serait suffisant pour monter que les thèses actuelles – Y2K – sur le calcul sont les filles des mathématiques modernes et que l'on a donc toujours pas quitté le terrain du formalisme qui se présente, comme en 65/75, " pour favoriser le succès des élèves en difficulté", "pour contrer la sélection", "pour coller aux maths vivantes"... Une faiblesse de la position du site "2 + 2 = 4 Mathematically Correct" est de nier le lien entre New Math et New New Math . En effet la définition des maths modernes y est la suivante : "New Math : A change in the perspective of mathematics education in the early '60s that emphasized set theory, and has nothing to do with the changes to math education today." L'intéressant cependant dans le vocabulaire américain est qu'il appelle entre autres Whole Math la réforme actuelle, ce qui la met bien en rapport avec les méthodes globales de lecture : "Whole Math : The current revolution in mathematics curriculum, akin to the Whole Language experiment, that emphasizes group discussion, essays, calculators and guessing and de-emphasizes basic skills and direct instruction".]

Voyons par exemple le cas de l'introduction de l’algorithme de la multiplication.

[Et nous avons ce qui était prévisible : un exemple pratique qui est au niveau de la théorie qui l'a fait naître]

"La justification de ces techniques nécessite un travail de transformation d'écritures ; à cet effet, il est indispensable que les enfants sachent quelles sont les transformations licites, c'est-à-dire sachent mettre en oeuvre certaines propriétés des opérations.

Exemple:
235 x 47
235 x (40 + 7)

(200 + 30 + 5) x (40 + 7)
[(200 + 30 + 5) x 7]+ [(200 + 30 + 5) x 40]

Une telle suite de transformations peut permettre de justifier des techniques de multiplication. Dans cet exemple sont intervenues, l’associativité et la commutativité de l'addition, la distributivité de la multiplication sur l'addition."

[Il est dit " il est indispensable que les enfants sachent quelles sont les transformations licites, c'est-à-dire sachent mettre en oeuvre certaines propriétés des opérations." C'est-à-dire que l'on introduit "l'algorithme de la multiplication" au primaire et comme forme d'apprentissage de la multiplication; mais la compréhension de cet exemple suppose des acquis qui sont ceux que justement que ne possèdent que ceux qui possèdent d'une manière très forte non seulement la multiplication mais l'ensemble des propriétés liant la multiplication et l'addition. C'est-à-dire que nous sommes dans une situation pédagogique qui n'existe pas. Les maths modernes sont tout à fait capables de créer des axiomes qui permettent la création d'objets qui n'existent pas ou dont l'existence est réduite au seul élément exhibé : la pédagogie moderne n'est pas en reste et peut créer des situations-problèmes avec des élèves qui peuvent ne pas exister]
 

En fait, le travail n'est pas terminé. Il faut encore une fois utiliser la distributivité de la multiplication sur l'addition et l’associativité de la multiplication pour écrire finalement

235 x 47 = 2 x 7x 100 + 3 x 7 z 10 + 5 x 7 + 2 x 40 x 100 + 3 x 40 x 10 + 5 x 40

Opérations élémentaires que l'on peut faire mentalement [je veux voir un exemple de ce délire sur des élèves qui sont en phase d'apprentissage et dans une perspective où il ne faut pas "faire de dressage" en utilisant le "par coeur"] ou en s'aidant d'une table de Pythagore pourvu que l'on ait compris la multiplication par une puissance de dix et que l'on sache faire une addition. Mais il faut bien reconnaître que ce travail de transformation d'écriture est un travail purement formel dont il n'est pas certain que tous les enfants de CE2 aient le goût ou la possibilité.

[La formulation est délicieuse pour parler d'impossibilité. Mais on a causé et c'est l'essentiel ! La COPREM a droit à une bonne note de participation même si elle dit des âneries : exactement comme en classe]

Une approche moins formelle peut certes être faite: à l'aide d'un matériel approprié (par exemple : matériel symbolisant unités, dizaines, centaines, mille par des petits cubes, des barres de 10, des plaques de 100, de gros cubes de mille, matériel constitué de jetons de couleurs, abaques), on peut facilement abstraire à partir des manipulations une technique pour multiplier un nombre de plusieurs chiffres par un nombre de 1 chiffre (quelle que soit d’ailleurs la base de la numération, celle-ci conditionnant seulement le mode d'échange) ou pour multiplier par la base.
Les instructions officielles disent d’ailleurs
"L'élaboration de techniques opératoires, par les enfants pourra s'effectuer à partir de manipulations ou de représentations"

[D'une part, ce n'est pas nouveau: j'ai appris à compter avec des bûchettes que je confectionnais en coupant des petites branches et que je groupais par 10, puis par 10 paquets de 10. Et s'il y a du nouveau, cela m'inquiète...
D'autre part :
Répétons ensemble : les IO ont raison, les IO ont raison...
Les IO sont le Verbe et la COPREM en est le messager...]

Une démarche formelle plus simple conduit alors à la suite de réécritures

235 x 47
235 x 40 + 235 x 7
(235 x 4) x 10 + 235 x 7

Les opérations 235 x 4 et 235 x 7 étant faites soit à l'aide du matériel (machine à calculer élémentaire) soit par une technique papier-crayon si elle est acquise.

[Parce que, si elle n'est pas acquise, il est dur de l'utiliser. Ce genre de précision débile est le résultat du progrès de la pédagogie de projet et corrélativement de l'abandon de l'idée de progression – qui précise les acquis pour aborder une nouvelle notion –, qui est simultanément le terreau sur lequel germe la théorisation de la situation-problème]
 

On pourrait aussi imaginer que le résultat est obtenu par une calculette.

[Souligné par moi: sans commentaire]

Découvrir et utiliser une technique papier-crayon permettrait aux enfants de comprendre que, bien sûr, la calculette donne beaucoup plus vite le résultat, mais que s'ils n'ont pas de calculette, ils peuvent faire fonctionner leur esprit et ils auront aussi le résultat.

[La technique bien connue papier-crayon s'appelait apprendre à faire des multiplications, a été employée avec succès sur de nombreuses générations
Rappelons ce qu'essayait de monter la COPREM dans ce paragraphe :
"La maîtrise parfaite des "quatre opérations" effectuées sur papier n'est plus de nos jours une nécessité absolue en soi,"
Il est difficile à la COPREM de dire C.Q.F.D.
Spectacle désolant]

2.3. Enchaînements d'opérations

Deux types de difficultés se présentent à l'enfant qui aborde (en général au cours moyen) les problèmes qui se résolvent non par une unique opération, mais par une suite d'opérations:

- la première difficulté, et la plus redoutable, est de découvrir la procédure à employer

[La difficulté essentielle pour l'élève n'est pas une question de "procédure" mais de compréhension du problème posé (je sais que les cognitivistes sont incapables de comprendre ce que je veux dire et j'y reviendrais dans un texte sur la multiplication). On sent le désir secret de la COPREM de définir la compréhension d'un énoncé et du problème qui correspond à cet énoncé comme une "procédure", c'est-à-dire comme un ensemble d'algorithmes que l'on considérerait comme un super algorithme appelé procédure dans sa globalisé. On a le rêve en fait de s'opposer à la vie – qui est tellement imprévisible et risque de menacer la COPREM en tant qu'organisme de pouvoir – en mettant au point un automatisme mental qui permettrait d'assurer l'automatisation maîtrisée de la découverte et de l'invention. Et nous allons dans ce sens maintenant que le ministre de la Recherche est en passe de devenir un ministre de l'Invention.]

- la deuxième difficulté est de décrire la démarche utilisée.

En effet, même un enfant qui découvre la procédure convenable peut avoir du mal à ne pas la percevoir comme un bloc indissociable, mais au contraire comme une suite de "pas", avec des étapes intermédiaires. Ainsi trouve-t-on souvent chez les élèves des écritures "naturelles" du type

15 + 8 = 23 x 4 = 92

[C'est la COPREM qui la conçoit comme un bloc indissociable en la réduisant à une procédure et qui analyse l'erreur de l'élève en plaquant dessus sa conception "algorithmique" et mécaniste computarisée.
Heureusement, on va le voir, les élèves, lorsqu'ils résolvent un problème ne considèrent pas la suite des opérations comme un tout, mais comme une suite d'opérations, ce qui est absolument inutile dans le cas d'un problème et correspond à préserver le sens par rapport à l'automatisme. Le fait de considérer une suite d'opérations comme un "tout" ne présente un intérêt – et représente simultanément une perte de sens mais justifiée en ce cas – que dans le cas ou l'on fait des exercices de calcul numérique qui servent à l'introduction du calcul algébrique qui est une forme d'automatisation du calcul arithmétique.Or l'utilisation de l'algèbre n'est justifiée que si l'on doit traiter une série de problèmes de même contenu mais dont les valeurs numériques "d'application" sont différentes.

Soit le problème suivant : " Un pneu coûte 400 F., une chambre à air 40 F., le montage 25 F. et l'équilibrage 15 F. J'en fais monter deux. Quel est le montant de la facture de la facture ?"

Tout être normalement constitué va calculer 400 + 40 = 440, puis 440 + 25 = 465, puis 465 + 15 = 480 et va ensuite multiplier 480 par 2 pour trouver 960. Il faut un pédantisme incroyable – et un manque de sens de l'observation bien aidé par une optique formaliste – pour prétendre que le calcul s'effectuera sous la forme
"( 400 + 40 + 25 + 15 ) x 2" ou
"400 x 2 + 40 x 2 + 25 x 2 + 15 x 2" et même s'il est effectué sur une calculatrice scientifique.

Par contre, si le problème est de traiter, et de plus à intervalles réguliers, ce problème pour un gérant de parcs automobiles, dans lequel on peut supposer pour l'exemple que seuls le prix p d'un pneu et le nombre n de pneus varient, il est alors logique d'écrire :
(p + 40 + 25 + 15) x n = (p + 80 ) x n = np + 80p, puisque une fois que l'on effectué le calcul algébrique précédent , le résultat s'obtient à chaque fois en faisant 3 opérations au lieu des 5 nécessaires dans le cas d'un calcul unique. Inversement appliquer cette méthode pour un seul calcul est aberrant. Sauf dans une perspective pédagogique qui doit être précisée dans l'énoncé du problème par un énoncé du type : "Si le gérant du parc doit effectuer régulièrement cette opération, les prix des pneus variant ainsi que le nombre de pneus à changer, tandis que les autres prix restent fixes, donner les opérations qu'il doit faire si l'on veut que, à chaque fois, il ne fasse que trois opérations". On peut imaginer des variantes : l'essentiel est de remarquer qu'il s'agit ici du problème intéressant de construction d'un algorithme ou d'un programme – à condition de considérer que les mathématiques ne se réduisent pas à ça – problème présenté comme tel, mais problème qui n'est pas du niveau d'élèves en phase d'apprentissage de la multiplication.
 

Reprenons la suite d'opérations donné par la COPREM qui doit être :

15 + 8 = 23
23 x 4 = 92

A part si l'élève maîtrise les priorités opératoires dans l'écriture de calculs en ligne – et dans ce cas-là le problème ne se pose pas –, les élèves n'ont vu comme utilisation de l'égalité que celle qui consiste à mettre à gauche du signe égal deux nombres et un signe d'opération et à droite de celui-ci le résultat de la susdite opération.

Cela signifie pour lui – en prenant 15 + 8 = 23 comme exemple – que l'égalité n'est pas une relation symétrique et que l'avancée dans l'écriture de la droite vers la gauche signifie qu'il a effectué un travail matérialisé par le signe =.

Le membre gauche de l'écriture 15 + 8 représente le fait de "poser l'opération" en deux sens qui peuvent se combiner

- choisir l'opération (addition) et les nombres qui doivent être additionnés (au niveau du sens de l'opération qui est la relation entre la compréhension du problème posé et le choix de l'opération dont l'utilisation lui semble adéquate à le résoudre)
- poser l'opération, ce qui consiste exactement à écrire les deux nombres de départ et le signe d'opération
Le membre de droite représente bien le résultat de l'opération qui n'arrive pas tout seul à partir du membre de gauche mais est le résultat d'une activité qui consistait classiquement à "faire l'opération" et peut être maintenant à appuyer sur les bonnes touches.

De toutes façons, il n'y a pas égalité au sens formel entre les deux membres de l'égalité et le signe = a pour l'élève un sens dynamique de la droite vers la gauche, cette dynamique se matérialisant symboliquement – assez mal par rapport au symbolisme mathématique qui n'a aucune valeur dynamique – dans le signe = qui représente l'activité physique et intellectuelle qui permet de passer de 15 + 8 à 23.

Une preuve de ce fait est qu'aucun élève n'écrit 23 = 15 +8 et que cette écriture leur pose même des problèmes de compréhension en sixième, la signification en étant peu claire pour eux. Un élève m'a même dit face à une écriture du type 7 = 5 + 2 : "Ça pourrait être autrement, ça pourrait être 7 = 4 + 3". C'est à dire que l'écriture 5 + 2 = 7 symbolise le déroulement d'une opération physique dont le contenu est en partie l'opération au sens mathématique (au sens où une opération mathématique donne toujours un résultat qui peut être un nombre ou deux nombres dans le cas de la division) tandis que l'écriture 7 = 5 + 2 symbolise, en réduisant son résultat à un couple d'entiers, l'activité intellectuelle de recherche des couples dont la somme est 7 et qui n'est donc en aucun sens mathématique une opération.

Quoiqu'il en soit l'égalité telle qu'elle est comprise par l'enfant

- n'est en aucun cas une relation symétrique et toute tentative de comprendre l'activité de l'enfant à partir de cette problématique piagétienne/"bourbachiste" donnera certes des statistiques et une jolie collection de tableaux mais qui n'auront aucun sens.
- ne représente pas pour lui une image statique – type balance – mais a au contraire un aspect dynamique.


Si l'on passe maintenant à 15 + 8 = 23 x 4 = 92, l'interprétation est plus complexe.

Mais l'enfant écrit d'abord 15 + 8 = 23 (1ère étape) et multiplie ce résultat par 4 (2ème étape), ce qui est complètement logique si l'on conçoit qu'il n'écrit pas une égalité au sens mathématique mais décrit son action : il utilise le résultat de l'addition (l'addition n'existant plus parce qu'elle est écrite avant, qu'elle appartient donc au passé) comme multiplicande d'une multiplication dont le multiplicateur va être 4, 28 x 4 ne représentant pas un nombre mais le fait de poser la multiplication.
Il est également possible de penser, qu'au point de vue visuel, 15 + 8 = 23 x 4 = 92 est la contraction de
15 + 8 = 23
23 x 4 = 92,
cette contraction se faisant en supprimant le mot qui se répète.

Il faudrait expliciter un peu plus la démarche de l'enfant pour que j'explique comment je fais mon cours pour passer de la forme "opérations séparées" à la forme "écriture en ligne" mais la question n'est pas ici d'expliquer comment il faut faire cours mais pourquoi la COPREM raconte n'importe quoi en plaquant des structures mathématiques formelles et de soit-disant structures cognitives sur une réalité qui est opaque pour elles à cause justement des oeillères que lui donnent la perception de la réalité au travers du filtre déformant de ces mêmes structures .
Globalement, et il suffit de savoir lire, l'élève écrit une suite d'étapes de son activité qui ne forment pas du tout un bloc indissociable – et c'est heureux pour le sens justement – mais une suite d'étapes dont chacune correspond à un sens particulier : ce que j'avance ici n'est pas traitable à partir de l'exemple donné par la COPREM puisqu'il n'a aucun sens et se limite à une suite de calculs. Il aurait été intéressant que la COPREM traite cet exemple sur un problème et pas sur un calcul : elle ne l'a pas fait, c'est son problème car elle était obnubilée par les "algorithmes" mais on verrait, s'il s'agissait d'un problème, que ces deux opérations forment encore moins un "tout indissociable" si l'on se réfère au sens des opérations en jeu...

Voyez, je n'ai ni besoin d'études statistiques ni d'utiliser les structures formelles – si ce n'est pour montrer qu'elles sont des obstacles "épistémologiques" – pour comprendre le sens de l'activité des élèves car j'appuie la compréhension de ce que j'affirme sur la liaison avec la progression qu'a suivi l'élève et la conception de la connaissance que révèle cette progression]
 

2.4. Une question délicate : la division

L’algorithme de la division pose plus de questions d'enseignement que celui de la multiplication. d'une présentation moins facile, encore que certains maîtres savent bien la mettre en place auprès de leurs élèves,

[Est-ce aussi vrai aujourd'hui ? Les jeunes sortis des IUFM "savent-ils bien le mettre en place" en ayant suivi les conseils éclairés des pédagogues de la COPREM ?]

il est aussi d'une exécution plus délicate dans le cas général, avec la nécessité d'une estimation (en tant il y va combien de fois tant ?) à chaque étape. Les avis sont alors partagés, entre les deux positions
extrêmes :
- viser à l'acquisition sûre d'une technique de division à la main
- abandonner la division à la main.

Il a paru prématuré dans le présent texte de trancher entre ces deux positions, ou d'opter pour une position intermédiaire. La question mérite d'être approfondie à l'occasion de l'étude du thème " algorithmes ", actuellement entreprise au sein de la COPREM.

[On peut bien sûr remarquer que, dans l'ensemble du texte, aucun argument n'est donné pour la défense prioritaire des opérations sur papier, et que le débat est en fait tranché par la victoire de ceux qui veulent abandonner la division à la main : mais l'annonce de l'abandon de la division à la main ne se serait pas fait dans un contexte aussi favorable qu'aujourd'hui car il manquait la cargaison de jeunes enseignants frais émoulus des IUFM et qui n'ont connu que ce qu'on leur a dit des "anciennes méthodes", c'est-à-dire pis-que-pendre et en déformant la réalité.

MAIS L'IMPORTANT N'EST PAS LA, il est dans le fait de confier le soin de trancher la question à une commission chargée de "l'étude des algorithmes", car cela équivaut exactement

- à dire qu'il faut abandonner la division à la main, dans la mesure ou l'on réduit l'intérêt de la division à son algorithme
- à beaucoup plus encore dans la conception des mathématiques si l'on prétend que c'est dans le cadre d'une "études des algorithmes" que l'on peut prendre une décision pédagogique sur la nécessité d'apprendre la division à la main, fut-elle un algorithme, ce qui est vrai,... en tant qu'algorithme.
Disons le d'abord de manière vulgaire – c'est-à-dire pour contrer l'opinion pédagogique dominante qui veut mettre partout et immédiatement "une activité purement mathématique", c'est-à-dire vide de sens à ce niveau –, l'algorithme, en tant que forme supérieure de l'automatisation de la pensée, est à l'intelligence même purement mathématique ce que le mode d'emploi (dans lequel justement Philippe Meirieu voulait que les enfants apprennent à lire) est à l'intelligence humaine, ou ce que les consignes de fonctionnement des machines-outils sont pour l'ouvrier sur une chaîne, c'est-à-dire la soumission de l'homme à la machine.

Si l'on le dit de manière plus élaborée : cela revient non seulement à réduire la pédagogie à des procédures , mais même à réduire les mathématiques à ce qu'est capable de faire un ordinateur, c'est-à-dire une activité algorithmique** ( Cf. la définition des ordinateurs donnée par G. IFRAH

"Mais les limites des ordinateurs sont tout aussi claires ils ne savent résoudre que des problèmes de nature algorithmique, c'est-à-dire ceux, justement, dont la solution n'est exprimable que sous la forme d'un algorithme. Aussi les ordinateurs ne font-ils que ce qui leur est dicté, dans une stricte obéissance et sans aucun discernement, quel qu'en soit le bien-fondé ou l'absurdité.
Quant aux opérations que ces manoeuvres exécutent, ils les effectuent d'une tout autre manière que nous sans volonté, ni conscience, ni sentiment, ni intuition, ni pensée inductrice ")
** Si la COPREM vise non pas l'apprentissage des algorithmes, mais la "création" d'algorithmes, il s'agit de toutes façons de réduire les mathématiques à une activité dont le nom même "création d'algorithmes" est sans contenu : la méthode est classique chez les formalistes qui croient que donner un nom suffit à créer la réalité désignée par ce nom.

Et citons les phrases lumineuses de René THOM, qui, dans la critique qu'il fait de Piaget en 1982, voit le rapport entre les maths modernes, la répétition algorithmique et la réalité de l'être humain :

"Il y a dans l'activité mathématique une volonté délibérée d'ignorer le réel, et même d'ignorer parfois les contraintes imposées par ses propres règles : presque tous les progrès de l'algèbre sont issus de ce désir de réaliser des opérations interdites (nombres négatifs, rationnels, imaginaires, etc.). Or, il faut bien voir que cette audace imaginative a pour contrepartie l'inefficacité des actions qui réalisent ces structures. Illustrons ceci par un exemple (fictif): supposons qu'un animal ait à sa disposition deux réflexes moteurs, désignés par les lettres a, b. Si cet animal est mathématiquement doué, il pourra symboliser l'ensemble de ses stratégies motrices par les mots du monoïde libre M (a, b) engendré par (a, b). Si ces réflexes conduisent à des translations effectives de l'animal, il existera des mots de longueur assez grande, qui, réalisés en déplacements, feront sortir l'animal de son habitat naturel et conduiront à sa perte. Ce n'est que si les réflexes sont totalement inefficients que la structure algébrique entière pourra se réaliser. L'exigence de la répétition formelle indéfinie des opérations est profondément non naturelle; seul le miracle — isolé — des lois physiques a pu faire croire que cette construction avait un répondant dans la réalité. A prendre des exigences axiomatiques pour des structures fondamentales du psychisme, la théorie piagétienne a servi de caution à l'entreprise moderniste en enseignement des mathématiques, avec les conséquences fâcheuses qui en sont résultées. Sans doute, j'en suis profondément convaincu, les mathématiques « informent » le monde comme elles « informent » aussi notre propre structure. Mais ces mathématiques-là ne sont pas celles que nous connaissons, celles que les algébristes nous fabriquent dans l'élan têtu de l'itération indéfinie des opérations formelles. c'est au contraire dans l'étude des limitations naturelles des formalismes que réside la mathématique de demain."

 
Tiré de "La genèse de l'espace représentatif selon Piaget" in Liliane Lurçat " Espace vécu et espace connu à l'école maternelle"]
En tout cas, ce qui n'est pas à remettre en cause, mais au contraire à développer, c'est le sens de la division

[Et on peut même le chanter en canon. Et comme le sens de la multiplication est pasé à la trappe depuis 30 ans, on peut toujours gloser sur le sens de la division]
 

2.8. Quelques indications de progression et d'évaluation

Les programmes actuels de l'école élémentaire proposent une progression satisfaisante dans l'ensemble. Seul l’algorithme de la division " à la main " a soulevé une interrogation à laquelle le présent texte n'a pas voulu proposer de réponse définitive.

[On peut faire mine de ne pas prendre position sur un sujet mais encourager des pratiques qui rendent un retour en arrière difficile et n'argumenter qu'en faveur de l'abandon du calcul crayon-papier]

Ce qui apparaît comme important, mais peut-être moins dans les textes que dans les faits, est l'utilisation très fréquente des calculatrices, en parallèle avec les autres techniques et moyens de calcul. Dès le cycle pré-élémentaire, des exploitations sont possibles, par exemple pour ce qui est du graphisme : l'aspect des chiffres en affichage "segments" sur une calculatrice peut être mis en évidence. Sans même faire de calculs, on peut jouer sur l'écriture des nombres de manière instructive et distrayante pour des élèves du cours élémentaire : il est maintenant "classique" de renverser une calculatrice affichant par exemple 51380 pour lire OBEIS.

[S'il s'agit d'habituer les enfants à la calculette comme on habitue un chien à ne pas avoir peur de l'aspirateur, on peut même les entraîner les enfants à mettre les calculettes dans l'eau, les faire brûler, toutes activités qui aboutiraient à en acheter d'autres et plus chères et plus perfectionnées : Ferrant, le bateleur de Casio, n'y voit certainement pas d'inconvénients. Si l'IG accepte de cosigner de telles âneries, il ne faut pas s'étonner ensuite qu'elle ait perdu du pouvoir, ce qui ne peut qu'aller dans le sens de la destruction d'une autorité centrale chargée de faire respecter des programmes unifiés et cohérents]

Mais c'est tout de même bien sûr le calcul qui interviendra le plus fréquemment.

[Ah bon ! Ce n'est pas que pour développer le commerce ?]

En annexe du texte sur la proportionnalité de la COPREM, quelques indications de progression possible dans l'usage de calculettes avaient été données. Dans le cours du présent texte, le parallélisme entre certaines acquisitions opératoires et des manipulations sur calculette a été envisagé. Plus généralement, on peut se soucier d'une progression dans l'analyse et la gestion d'un calcul, dont on sait les difficultés qu'y éprouvent beaucoup d'élèves. Voici des propositions dans cette direction

1) Étude des expressions contenant une addition et une multiplication. Découverte de l'utilisation de parenthèses (quel est le premier calcul à effectuer ?). Les nombres utilisés sont des entiers naturels ou des décimaux positifs.

2) Étude d'expressions plus complexes, présentant plusieurs additions et multiplications. Parenthèses emboîtées. Priorité de la multiplication sur l'addition, permettant de simplifier les écritures. Utilisation de la mémoire d'une calculette.

3) Étude de la distributivité de la multiplication sur l'addition. Programmes de calcul "équivalents" (tels que a ÷ (b x c) et a + b ÷ c). Utilisation du facteur constant sur calculette.

4) Étude d'expressions contenant addition, multiplication, puissances simples (2 et 3). Priorités des opérations.

5) Introduction des nombres relatifs dans les expressions déjà étudiées. Simplification de l'écriture des nombres. Écriture des nombres positifs et négatifs par la calculatrice.

On notera que ces indications concernent la scolarité jusqu'au niveau du cycle d'observation des collèges (classes de sixième et cinquième). On retrouvera dans les indications d'évaluation que c'est à ce niveau également qu'un certain nombre d'objectifs sont proposés. c'est en effet à ce moment que les diverses écritures de nombres auront été présentées et manipulées. A partir du cycle d'orientation des collèges (classes de 4e et 3e), ce sont les traitements de variables et de fonctions numériques qui sont à envisager systématiquement. En parallèle, on passera des calculettes aux calculatrices scientifiques comme outil de calcul individuel courant. c'est d’ailleurs pourquoi on peut envisager de n'étudier qu'a ce niveau scolaire les puissances autres que 2 et 3 ; en contrepartie, les calculs sur les fractions, qui sont les bons "outils" de traitement pour la proportionnalité, peuvent figurer plus tôt qu'en classe de 4

[Il est également intéressant d'observer que l'on recommande de ne faire calculer que sur les "petites puissances" de la même manière qu'il ne faut faire calculer à la main que sur les petits nombres. L'intérêt des puissances est d'écrire de manière raccourcie une multiplication qui se répète : ainsi 10 puissance 19 s'écrit avec 4 chiffres en notation exponentielle alors qu'il en faut 20 en écriture normale. Et, justement, cela ne se voit que si l'on écrit des grandes puissances]

Au niveau des lycées, le calcul devrait amener à des réflexions systématiques sur :

1) les algorithmes,
2) la précision et le calcul approché.

Le présent texte a mentionné le parallèle entre ces réflexions et l'étude de la dérivation, des suites, de la résolution d'équations. L'idée générale est d'exploiter dans le cadre numérique les acquis présentés dans un cadre algébrique : “Pas de formule qui n'ait été utilisée numériquement". Encore mieux lorsqu'un problème numérique d'énoncé très simple a pu être utilisé à un niveau d'introduction.

[les progressions des années 1890 1960 réalisaient justement cela]
 

Objectifs dans le domaine du calcul numérique pour la fin de la classe de 5e

• Savoir mentalement multiplier et diviser des nombres par 10, 100, 1000, ., ainsi que par 2, par 5 et leurs carrés [Programme de CM de 1882 à 1960]
• Lire et interpréter un nombre affiché, en étant capable de le tronquer ou l'arrondir (extraction d'information [ Ah! l'information!]).
• Gérer un enchaînement de calculs (parenthèses, exploitation de la distributivité) sur des nombres décimaux relatifs.
• Savoir comparer, ajouter, multiplier deux fractions. reconnaître en particulier une égalité de fractions. [Programme de CM de 1882 à 1960]
• Savoir suivre des inégalités lors d'additions et de multiplications. Ainsi, savoir encadrer un produit ab quand on connait des encadrements de a et de b.
 

Objectifs dans le domaine du calcul numérique pour la fin de la scolarité obligatoire.

• Etre capable d'appliquer, pour des vérifications, des procédures de calcul mental rapide. [mental et rapide ?]
• Savoir utiliser l'écriture des nombres sous la forme d'une mantisse et d'une puissance de 10, notamment l'écriture scientifique.

[L'écriture ingénieur, probablement trop "physique" et compatible avec la lecture humaine des grands nombres puisqu'elle partage l'écriture suivant l'écriture en classes, n'est pas mentionnée ; encore une "prémonition" de la COPREM puisque l'écriture ingénieur a disparu des exigences du collège il y a deux ans]

• Gérer des calculs comportant des rationnels, des puissances entières, des radicaux.
• Savoir utiliser des fonctions (1/x, Cos, Sin, en plus de x2 et -E) dans des calculs numériques.
• Savoir procéder à du calcul exponentiel sous forme d'itération de multiplication (exemple : trouver une procédure de calcul permettant de déterminer en combien de temps double une population qui augmente de 8% tous les 10 ans).
• Résoudre des équations et inéquations du premier degré en une variable, des systèmes du premier degré en deux variables, à coefficients numériques.
• Pouvoir approcher par une procédure d'essais successifs un résultat non directement accessible, avec une précision relative restant modeste (de l'ordre de 1/100-ème) et dans des cas où la manipulation opératoire des inégalités suffit pour des encadrements. Exemple : approcher x > O tel que x2 (x + 1) = 1000.

[Je ne prendrai pas position sur ces objectifs jusqu'au niveau cinquième car la discussion serait trop longue par rapport à l'enjeu du texte. Il est cependant à remarquer que, si la logique purement mathématique de ces positions se tient, les IPR ont donné successivement des séries d'exercices type, dont le niveau de difficultés a d'ailleurs régulièrement diminué, ce qui suffirait à montrer l'inadéquation entre les contenus espérés et les méthodes et les progressions recommandées]

Objectifs dans le domaine du calcul numérique en fin des lycées.

La diversification des sections ne permet pas de proposer une liste unique analogue aux précédentes et les prolongeant. Voici simplement les situations à propos desquelles les objectifs sont à déterminer section par section, dans celles des sections bien sûr où les situations présentées ici ont une place :

• itération d'un programme de calcul
• Calcul approché avec une précision imposée d'avance ou à donner à la fin
• Exploitation des ordres de grandeurs variés à l'intérieur d'un calcul
• Résolution approchée d'équations par dichotomie, par la méthode de Newton
• Calcul approché d'intégrales
• Résolution des équations du second degré
• Utilisation des diverses fonctions présentes sur une calculatrice scientifique courante
• Utilisation des formules usuelles de trigonométrie
• Calcul sur les nombres complexes
• Calculs statistiques (savoir introduire les données et obtenir les paramètres statiques sur machine)
• Savoir utiliser un générateur pseudo-aléatoire pour simuler des épreuves courantes (pile ou face, dés, .j.

La liste donnée se limite au calcul facile à entreprendre à l'aide (éventuelle) d'une calculatrice scientifique courante. Le traitement général des systèmes linéaires est un traitement de tableaux pour lequel le bon outil, si nécessaire, est l'ordinateur. De même, l'obtention des fonctions dérivées et des primitives font partie du calcul symbolique. Il s'agit donc d'un autre domaine que celui envisagé dans ce texte, même si le calcul symbolique est aujourd'hui à la portée des ordinateurs.

[Et j'ajouterais aujourd'hui, grâce à Casio et à la France, à la portée des calculatrices. – On est les champions !!! –]
 

2.9. En guise de conclusion

Une réserve

Dans le texte, ce qui est le plus neuf tient évidemment le plus de place.

[Ce n'était pas vrai dans les progressions avant 1960. C'est ça la perspective commerciale : regardez n'importe quel site Web d'e-business : "ce qui est le plus neuf tient évidemment le plus de place"]

Il s'agit de l'incorporation des calculatrices à la démarche de l'enseignement. Les aspects plus traditionnels, qu'il s'agisse des traitements numériques ou algébriques, y ont certes leur place, [sauf le calcul à la main, bien sûr] mais donnent lieu à des développements moindres. Il ne faudrait pas s'y tromper : l'essentiel est la mise à disposition des élèves, pour l'apprentissage, de l'ensemble des connaissances, savoir-faire et techniques courants dans le monde d'aujourd'hui.

[Dans une pensée  commerciale, l'essentiel est à la mise à disposition des clients des derniers produits. Pour les plus anciens, on trouve "Cette ligne de produits n'est plus suivie"]

Des expérimentations, dont on peut souhaiter qu'elles soient nombreuses à la suite des présentes réflexions, devraient dégager avec plus de précision qu'ici les articulations entre différentes pratiques.
 
 

Un constat

“Les élèves ne savent plus calculer", voilà une ritournelle qui revient souvent. Comparées avec les performances de leurs prédécesseurs, les performances des actuels élèves la démentent[ On en recause ? Et malgré les statisitiques ad-hoc ]. Mais ce qui apparaît néanmoins comme vrai, c'est l'existence d'un décalage entre le calcul appris durant la scolarité obligatoire et les besoins actuels en calcul. Ce décalage justifie la ritournelle à condition d'admettre qu'autrefois, le calcul appris correspondait bien aux besoins de l'époque ; il serait souhaitable que ce ne soit que provisoire, et qu'au contraire la perspective d'adéquation entre ce qui est acquis et ce qui est nécessaire soit proche.

[Une hypothèse : dans une société automatisée, les êtres humains sont soumis aux machines et le B.O. Spécial 7 est arrivé à une adéquation presque parfaite : des élèves décérébrés pour une société de décérébrés c'est-à-dire arriver à l'intelligence de l'homme neuronal, celle d'un "paquet de neurones" chère à J.-P. Changeux.

Merci une fois de plus à François Lurçat : un scientifique qui se rebelle contre le scientisme devient un objet rare et difficile à voir car il ne passe pas à la télé.
Cf. "De l'homme neuronal aux neurosciences" publié en 1985 dans le N° 31 de Commentaire, reproduit dans "L'autorité de la Science"]
 
 

 
Table des Matières
 Documents
Introduction
COPREM 1983
 Progressions Primaire1882 - 1923
BO Special 7 Primaire 2000
Lieury : Méthodes pour la mémoire
 Intelligence : JF Richard