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École : la fin du maître unique.

Le Nouvel Observateur, n° 1873, du 28 septembre au 4 octobre.


À 10 ans, ils ne savent pas toujours si la recette du chausson aux pommes, consignée sur une fiche, est de l'expression écrite, de la technologie ou de la cuisine. Ils ont parfois tant de classeurs et d'adultes en face d'eux qu'ils en perdent leurs repères. Nos écoliers et leurs maîtres ont besoin qu'on clarifie leur travail : c'est ce qu'on pouvait conclure la semaine dernière, après avoir écouté à l'Institut national de la recherche pédagogique des chercheurs ayant planché depuis trois ans sur le métier et la formation des professeurs des écoles
(1). Ce devrait être un des objectifs de la réforme de la formation des enseignants du premier degré que prépare le ministère Lang pour octobre.

On le sait peu, mais l'instituteur " seul maître à bord " appartient au passé : les deux tiers des maîtres de l'école élémentaire, depuis une quinzaine d'années, se font épau1er dans certaines matières ou activités par d'autres adultes : leurs collègues d'abord, puis des " intervenants extérieurs ", souvent municipaux, assurant éducation physique et sportive, arts plastiques, éducation musicale ou activités d'animation, puis les spécialistes en langues vivantes, collègues ou jeunes étrangers. Derniers venus, les aides-éducateurs, soit le gros des 65 000 emplois-jeunes embauchés ces trois dernières années.

Près d'une commune sur deux envoyant du personnel dans ses écoles y consacre moins de 400 francs par élève, mais 5% plus de 2 000 francs. Cette révolution silencieuse de la fin du maître unique n'avait jamais été vraiment évaluée, seule une étude ministérielle avait conclu jusqu'alors à l'absence de résultats significatifs. Nos chercheurs vont dans le même sens : ils n'ont pas vu d'effets très positifs pour les élèves à l'apport de tous ces auxiliaires du maître. Pis, il est fort possible que les élèves les plus fragiles en pâtissent... Comme de l'apprentissage en primaire des langues vivantes, qu'une recherche a sérieusement mis à mal, en liant notamment apprentissage de l'anglais et moindre réussite des élèves en français (2). On est à rebours de la classique incantation collective: " Faisons un effort, c'est un plus... "

Mais allez persuader les maîtres qu'ils feraient peut-être aussi bien seuls ce qu'ils font aujourd'hui avec l'aide d'auxiliaires ! Leur métier est devenu d'une complexité rare. Et se révèle ardu: le maître, indique une des études de l'INRP, dépense le plus clair de son énergie à mettre ses ouailles au travail et à tenter de les y garder...

Anne Fohr

(1) Consulter, sur ce colloque, le site www.inrp.fr
(2) "L'Enseignement des langues vivantes à l'école élémentaire : quels acquis pour quels effets au collège ? Le cas de l'anglais", Cahiers de l'Iredu, n° 58.