L'absence de liberté pédagogique dans l'enseignement primaire, quelques exemples.


Un collègue me raconte hier comment un jeune PE2 de l’Académie de R. a été choisi pour servir de cobaye à un passage d’examen de maître formateur. Mon jeune collègue n’a effectivement pas su faire briller ses élèves devant tout ce groupe d’adultes intimidants. L’Inspecteur présent utilise quand même l’occasion pour porter un jugement écrit. Il dit à mon jeune collègue –en substance : " Ce n’est pas votre façon de faire qu’il faut changer, mais votre personnalité ".

Un instituteur confirmé de l’Académie de l’---------, fait compter systématiquement tous les matins plusieurs additions et soustractions autour de la dizaine à ses petits CP. L’inspecteur qui s’en rend compte tentera de lui enlever un point : ce sont des " additions décontextualisées ".

Un instituteur de CP confirmé de l’Académie de l’------- utilise ouvertement la méthode de lecture " Gafi " parce que c’est la plus facile à détourner en méthode syllabique –il n’y a aucune méthode syllabique disponible. Il est depuis sa dernière inspection, poursuivi par une inspectrice qui revient tous les ans lui enlever un point parce qu’il n’accepte pas cette théorie qu’il faudrait " prendre le risque des hypothèses " pour apprendre à lire.

Ma jeune collègue Rachel Boutonnet (" Journal d’une institutrice clandestine " - Ramsay – 2003) pratiquait la méthode syllabique clandestinement parce qu’elle savait ce qui ne manquerait pas d’arriver. L’inspectrice qui s’en est rendu compte a tonné qu’on allait voir ce qu’on allait voir.

Cent cas semblables depuis la rentrée. Et on ne compte pas ce qu’on ne sait pas.

La liberté pédagogique n’est plus ce qu’elle était.

Quand le ministre réhabilite volontairement les méthodes syllabiques et le travail systématique en classe, une partie du corps des inspecteurs poursuivent les instituteurs et professeurs des écoles qui utilisent les méthodes syllabiques ou le travail systématique.

Il nous semble que certaines des propositions du ministère vont dans le sens de la réduction de l’illettrisme et s’opposent à la catastrophe culturelle en cours. Elles sont malheureusement fréquemment contrariées par la partialité idéologique de certains inspecteurs. La liberté pédagogique est une garantie de réussite : il faut laisser les praticiens corriger leurs théories en fonction des résultats qu’ils obtiennent.

Nous revendiquons donc la liberté pédagogique. Dans ce sens, pour qu’une partie du corps des inspecteurs arrête de contrecarrer les buts du ministère, en particulier en matière de lutte contre l’illettrisme, peut-être serait-il possible de leur repréciser l’intérêt de la liberté pédagogique, en particulier pour ce qui concerne les méthodes de lecture syllabiques ?

Marc Le Bris, " Sauver Les Lettres ",

entrevue au Ministère de l’Éducation Nationale du 10 mars 2004.