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Ecole : d'Allègre à Lang

Dans " Le Monde des idées " sur LCI, le journaliste Edwy Plenel avait invité le samedi 9/9/2000 Mme Marie Duru-Bellat (1) , sociologue et M.Didier Dacunha-Castelle (2) , mathématicien . Le titre de l'émission était : " Ecole : d'Allègre à Lang ".

NDLR : Il n'est pas sûr que cette néo-expression supplante le classique " de Charybde en Scylla " …

(1) Vient de publier : L'hypocrisie scolaire - Pour un collège enfin démocratique. / L'épreuve des faits
(2) Peut-on encore sauver l'école ? / Flammarion

Pour consulter la vidéo sur le site de LCI : http://www.lci.fr/wdsites/member/idee_1398/index.asp


Transcription partielle :

1ère partie de l'émission du 9/9/2000 à 17h10 :

(…)

Edwy Plenel : Alors, Didier Dacunha-Castelle, vous étiez au cœur du système, puisque vous étiez le conseiller spécial, d'abord responsable des programmes, puis le conseiller spécial du ministre, et là vous faites un livre qui est un livre terriblement pessimiste et dont j'ai envie de vous dire : " Mais, au fond, est-ce qu'il n'est pas accablant pour ce que vous avez vécu pendant ces trois ans ? " Quand quelqu'un qui a été au cœur, qui a tenu les manettes avec le ministre dit : " On a un système éducatif en péril de dévoiement, nous sommes devant une école en sursis "…est-ce que ce n'est pas quelque part vous-même que vous accablez ?

Didier Dacunha-Castelle : On s'accable soi-même quand on est enseignant ! Donc, dans cette mesure, effectivement, je me sens responsable, comme tout un chacun, de l'état de l'école. J'ai été effectivement à l'intérieur pendant ces trois dernières années, mais, au fond, ce constat, j'ai également été président du Conseil national des programmes quand Lionel Jospin était ministre de l'Education…

Edwy Plenel : Le premier !

Didier Dacunha-Castelle : Le premier président ! J'ai également participé à l'élaboration de la loi d'orientation et ce constat, au fond, je l'avais fait il y a dix ans. Je ne suis pas très pessimiste puisque ce que je pense, c'est qu'on peut quand même redresser les choses. Il y a des mesures qui finalement, dans une discussion de bonne foi, qui pourraient être admises par tous. Maintenant, la situation me paraît assez grave si on laisse le système continuer à dériver …

Edwy Plenel : Y'a pire que ça parce que vous dites que si on prend à l'aune républicaine, celle de l'égalité des chances, celle de la promotion sociale, le système est encore plus inégalitaire qu'il ne fût jamais. Vous citez un chiffre en disant qu'en Terminale scientifique, l'élève originaire de famille favorisée, le pourcentage est passé de 30% à 35%.

Didier Dacunha-Castelle : Oui ! On pourrait citer de nombreux chiffres ; on peut aussi prendre des symboles sociaux. Par exemple, statistiquement pour réussir actuellement le concours de Médecine, si on ne passe pas par le privé, d'ailleurs assuré par des collègues de l'enseignement public, avec des cours qui sont, des fois, de l'ordre de 500 F par heure, on a très peu de chances d'être reçu au concours de Médecine. Et ça, c'est quand même assez terrifiant du point de vue républicain.

(…)
Edwy Plenel : Alors, Marie Duru-Bellat, votre livre, écrit avec François Dubet, est différent du récit de l'intérieur et du diagnostic posé par Didier Dacunha-Castelle , puisque c'est, au fond, une enquête sur le collège, sur sa réalité, sur les acteurs.
(…) Mais si on prend toujours le fil conducteur de pourquoi un ministre qui se voulait très réformateur a échoué finalement à convaincre et à entraîner les personnels éducatifs, au fond, est-ce que la réponse n'est pas quand vous écrivez vous-même : "On change quand on a de bonnes raisons pratiques de le faire, non par un goût inné du progrès, de l'obéissance ou du sacrifice ou parce que la vérité s'est révélée". Ceux qui dénoncent le conservatisme et le corporatisme des enseignants, ceux qui disent " il n'y a qu'à … ", imaginent souvent le travail pédagogique comme si c'était le travail à l'usine, formaté, etc. . l'échec de Claude Allègre n'est-il pas là ?

Marie Duru-Bellat : On voit bien que pour évoluer, il faut lancer le débat au delà du cercle des enseignants et c'est là l'échec d'Allègre et c'est là qu'on était finalement nombreux à être d'accord avec lui quand il posait de vraies questions, des questions vraiment explosives - on peut en lister quelques-unes - mais qu'il a échoué, me semble-t-il, à engager un débat qui était nécessairement de nature politique et qui ne se limitait pas aux seuls acteurs, parce que les acteurs ont leur vie d'acteur, ils ont des raisons de ne pas changer, mais, en même temps les questions que pose Allègre concernent tout le monde, avec des débats qui ont souvent été ridiculisés, comme " l'enfant au cœur du système ". Qu'est-ce que ça veut dire " l'enfant au cœur du système " ? C'est pour qui l'école est-elle faite ? Or ça, c'est une question importante et c'est pas que les enseignants qui peuvent y répondre, ça concerne tout le monde et c'est là, je crois, l'échec d'Allègre :il a pas su lancer ce débat véritablement politique.

Edwy Plenel : Il n'a pas su parce qu'il n'a pas voulu, parce qu'il en a été empêché ou parce que lui-même n'était pas un politique ? Est-ce que le savant égaré en politique…

Marie Duru-Bellat : Moi, je ne ferai pas de psychologie… je suis sociologue. Je pense que ces questions, un certain nombre de ministres s'y sont cassé les dents. Ce n'est pas la première fois que des ministres de l'Education ont été mis en difficulté sur ces questions fondamentales, c'est " A qui appartient l'école ? ". Il a posé les vraies questions explosives. Après, le débat a dérivé, a été détourné avec des intérêts particuliers - on en parlera tout à l'heure - qui n'ont rien de républicain. Mais ça n'est pas la faute d'Allègre. Après, il y a eu des maladresses personnelles : c'est un autre débat qui n'est pas intéressant…
(…)
Marie Duru-Bellat : Au niveau du collège, il faudrait vraiment remettre à plat cette idée : est-ce que former un gamin jusqu'à seize ans, c'est lui donner un saucissonnage de disciplines ? Notre réponse est non ! Mais, en même temps, on voit bien que c'est un enjeu puisque, dès lors que l'on introduit une once de pluridisciplinarité, c'est la culture française qui est attaquée comme on l'a vu dans des débats violents. Mais, c'est encore plus vrai au niveau du collège qu'au niveau du lycée.

Edwy Plenel : Ca, on va en parler dans la deuxième partie de l'émission, à propos de ce que vous appelez, au fond, les républicains conservateurs ou les républicains " en peau de lapin " si je vous suis bien, en tout cas qui ne sont pas du côté de la transformation sociale du côté de la république, après les dernières infos sur la chaîne info ….


2ème partie de l'émission du 9/9/2000 à 17h40 sur LCI :

Edwy Plenel : Retour au " Monde des idées ". Nous discutions de l'école, de son avenir. D'Allègre à Lang, d'une rentrée à l'autre. Est-ce que nous allons pouvoir avoir enfin dans ce pays un débat politique serein et non pas, un débat à coup d'invectives sur l'avenir de notre système éducatif ? (…)
Alors, Marie Duru-Bellat, il y a un thème très fort dans votre livre qui est au fond et il est d'autant plus fort que c'est très serein, c'est pas du tout justement polémique, mais vous démontez la rhétorique des républicains qui s'en prennent à ceux qui veulent assassiner les savoirs, détruire la république et vous dites : "C'est pas la république, leur affaire. C'est pas l'histoire de l'égalité et de la fraternité : c'est un pur élitisme présenté comme républicain dès que la sélection est de leur côté socialement". Vous dites : "C'est une république de l'ordre moral et culturel qui est aussi un ordre social". Vous dites que cette démarche là marche parce qu'elle s'enracine, hélas, dans la souffrance des professeurs. En fait, c'est un réquisitoire contre les républicains conservateurs. Expliquez nous ça !

Marie Duru-Bellat : Ils sont conservateurs parce que ce qui les chiffonne finalement, c'est qu'on touche au lycée de l'élite. Ils sont très attachés à l'image d'un lycée où finalement on a des élèves triés sur les volets et qui sont en phase immédiatement avec ce qu'on leur propose. Dès lors qu'on touche un peu à la dissertation, c'est la catastrophe, alors que, dans le même temps, le fait qu'il y ait à la fin de la scolarité obligatoire, 10% des petits français qui aient du mal à lire, ça, ça ne les gène absolument pas ! Donc, qu'est-ce que c'est que l'école républicaine ? C'est préserver le lycée en l'état pour une petite frange de la population. Mais au collège se posent des problèmes bien plus dramatiques dans la mesure où c'est censé être l'école de tous. Or :
1 - tout le monde n'en sort pas qualifié et
2 - ce qui nous a beaucoup frappé lors de la consultation, on assiste à une diversification effrayante des collèges.
Evidemment dans les collèges des beaux quartiers, on prépare bien les petits jeunes pour le lycée et ils seront de bons élèves au lycée. Mais il y a vraiment une dérive dans certains quartiers sur laquelle il est facile de fermer les yeux et ça les républicains, ça les intéresse pas. Ce qui les intéresse, c'est qu'on continue à former de futurs agrégés de grammaire, ça, c'est très important !

Edwy Plenel : En clair, la démocratisation sociale de l'école n'est pas leur problème !

Marie Duru-Bellat : Non, ce n'est pas leur problème. D'ailleurs, ils vont jamais jusqu'à tirer les conséquences de leurs discours quand ils disent finalement : " On abaisse, on dégrade la culture ". Qu'est-ce qu'il faut faire ? Les élèves sont là ! L'école de la république, c'est de prendre les élèves qu'on a en France ! On peut regretter d'avoir les Français qu'on a, mais qu'on le dise alors et que l'on dise ce qu'il faut en faire ! Or ça, ils le disent jamais ! Est-ce qu'ils veulent revenir à l'examen d'entrée en 6ème ? A une époque où il y avait 10% de jeunes au bac ? Ca, ils ne le disent pas ! Donc, ils sont même pas très courageux, d'une certaine manière…

Edwy Plenel : Didier Dacunha-Castelle, de ce point de vue, vous leur envoyez, vous, une démonstration de mathématicien, chiffres à l'appui, puisque beaucoup de ces contestataires de votre passage avec Claude Allègre ont été des philosophes et vous racontez quelque chose qui m'a sidéré, c'est les notes de l'agrégation de philosophie. Expliquez-nous ça ! La démonstration mathématique, elle est accablante, je trouve !

Didier Dacunha-Castelle : Elle est accablante parce que les notes ou les moyennes des gens qui sont reçus à l'agrégation de philosophie sont de l'ordre de 5/20…

Edwy Plenel : 4, 61 ! 4, 61 ! !

Didier Dacunha-Castelle : Voilà ! On se demande si ou bien ils ne savent pas noter au-delà de 6 ou 7… Je crois qu'il y a 10 étudiants sur 1500, qui sont à bac + 6, qui ont la moyenne générale à l'agrégation…

Edwy Plenel : Vous dites exactement : " 6 sur 1400 qui ont une note au-dessus de 12 " !

Didier Dacunha-Castelle : Voilà ! Ces chiffres sont vraiment terrifiants ! C'est propre à la philosophie. Ces gens qui tiennent la philosophie française, ce ne sont pas tous les philosophes - ce n'est pas la philosophie que j'attaque, bien au contraire - mais c'est un groupe informel qui tient la philosophie et qui est d'un élitisme carrément stupide, qui sont rétrogrades au point que le président de leur association veut revenir au bizutage ! Je ne sais pas ce qu'en pensent un certain nombre de jeunes filles dans l'enseignement supérieur ! C'est quand même grave pour une association de professeurs de vouloir revenir au bizutage avec les conséquences dramatiques que ça a eu ces dernières années…

Edwy Plenel : La citation exacte, il faut la donner pour qu'on n'ait pas l'air de faire une calomnie : " On interdit tout bizutage, alors qu'il serait souhaitable d'en limiter les excès. Le bizutage est un contre-rite qui valorise les rites de l'institution".

Didier Dacunha-Castelle : Revenons aux " traditions des gadz'arts " d'autrefois ! Ca, c'est au niveau de l'anecdote…

Edwy Plenel : L'histoire de l'agrégation de philosophie, ça veut dire qu'au fond on s'en fout de 90% des types qu'on matraque…

Didier Dacunha-Castelle : Oui ! On les envoie dans le mur…

Edwy Plenel : Des années d'études pour rien !

Didier Dacunha-Castelle : Des années d'études pour rien. C'est pas possible que nos départements de philosophie forment des gens qui valent 4/20. C'est pas vrai !

Edwy Plenel : Ca veut dire que le barème est mauvais ?

Didier Dacunha-Castelle : Ca veut dire que le barème est mauvais. C'est la même chose pour le bac. La dissertation philosophique est très en dessous de la dissertation française, très très en dessous, de 5 points en moyenne à peu près. Ce n'est pas une question d'expression écrite, c'est vraiment dans les contenus. C'est très inquiétant de voir que ces gens finalement même grosso modo ont le monopole de l'expression sur l'école.

Edwy Plenel : Ils défendent quoi ? Leur pouvoir ? Leurs intérêts économiques ? Est-ce qu'il faut être marxiste vulgaire pour essayer de comprendre ?

Didier Dacunha-Castelle : Je crois que vraiment on touche alors là à un problème d'idéologie. Parce que qui sont ces gens ? Y'a pas besoin de se cacher ! Y'a une partie des gens qui sont à un syndicat, Force Ouvrière, qui est une secte ultra-passéiste. Il y a là, on trouve là un certain nombre d'expressions dans la presse, on retrouve aussi pas mal de gens du Mouvement des Citoyens, qui ont été plus loin que Chevènement dans ce domaine et l'ont dépassé. Mais c'est un groupe relativement qui voit la république comme quelque chose, comme l'a expliqué Marie, d'extrêmement dépassé. Ils rêvent d'un lycée d'ailleurs qui n'existe plus du tout ! Quand on dit qu'ils sont conservateurs… il faut pouvoir conserver quelque chose qui existe ! Or, le lycée d'aujourd'hui n'a rien à voir avec le lycée dont ils parlent. Alors ils sont capables vraiment de n'importe quoi ! Sur la dissertation française - vous pouvez attaquer Allègre, à juste titre, sur beaucoup de points - mais jamais, au grand jamais, puisque j'ai été responsable des programmes, personne n'a envisagé en quoi que ce soit de toucher à la dissertation au bac ! Le problème n'est pas là. Ce qui a été envisagé c'est de rajouter une épreuve, disons de créativité, qui soit la rédaction classique, mais au niveau du lycée. (…)
A partir de là, ils ont réussi, c'est quand même étonnant - à savoir notre université est au point quand elle réfléchit sur l'école - ils ont réussi à faire rentrer dans une pétition monstre beaucoup d'intellectuels, dont certains sont mes amis d'ailleurs et ça, c'est quand même très étonnant, à partir de l'idée, on détruit - finalement c'est leur seul fonds de commerce - on détruit les belles lettres, on détruit la philosophie, on détruit la grande culture, mais ils ne disent jamais comment on la maintient. Ca, ça ne les intéresse pas…

Edwy Plenel : Est-ce qu'il faut quand même pas apprendre de ses erreurs ? De toute manière, votre livre c'est le récit de "On a voulu faire quelque chose, nous avons été dans le mur"- vous ne dites pas le complot - vous expliquez des erreurs etc. La vraie question qu'il faudrait essayer de comprendre, c'est pourquoi si tout ça est totalement idéologique, plein de rumeurs ou de mensonges, on a pu embrayer sur le malaise des enseignants ?

Didier Dacunha-Castelle : Mon analyse est assez terre à terre sur le malaise des enseignants. D'abord, c'est pas un bloc absolument uniforme ! Entre un enseignant, dont parle Marie, qui est dans un collège extrêmement difficile, la directrice d'école primaire qui rentre chez elle le soir à huit heures et l'agrégé d'allemand qui enseigne dans un grand lycée du centre ville et qui fait depuis plus de vingt ans le même cours, les conditions de vie sont pas du tout les mêmes ! Je pense que les enseignants, depuis bien longtemps dans ce pays se sont sentis mal aimés et un peu persécutés. Qu'un certain nombre de mots très malheureux d'Allègre, qui ne s'est pas expliqué, que c'était très malheureux de sa part sur l'absentéisme, ont provoqué une espèce de coalition des enseignants contre lui. Et puis encore, je pense effectivement qu'il a attaqué les syndicats brutalement sur l'affaire de la cogestion, sur l'affaire du pouvoir syndical, le problème des mutations (…). Tout cela a provoqué effectivement une coalition des enseignants contre lui et évidemment ces conservateurs républicains se sont engouffrés dans la brèche et ont fait la jonction avec ce mécontentement enseignant. Voilà ! Les raisons de l'échec sont là ! Je ne pense pas qu'il y ait eu de débat de fond raisonnable sur aucun des points que l'on a évoqués jusqu'à maintenant !

Edwy Plenel : Marie Duru-Bellat , est-ce que la responsabilité n'est pas celle des politiques ? Vous insistez en conclusion, la formule est claire : " L'école a besoin de politique, de débat démocratique " et au fond, vous regrettez qu'il n'y ait pas eu de débat au parlement. L'école ce n'est pas une affaire de référendum : on ne peut pas dire oui ou non, mais, en revanche, un débat de fond de la représentation nationale sur l'école aurait été quelque part nécessaire.

Marie Duru-Bellat :Oui, bien sûr ! Mais on en a encore l'illustration aujourd'hui pour en revenir au ministre actuel si on regarde ce qui se passe dans le primaire…

Edwy Plenel : Jack Lang ?

Marie Duru-Bellat : Jack Lang. Il introduit des langues en primaire : tout le monde est content ! Ca fait plus ! Quand on fait plus à l'école, ça marche toujours ! Qu'est-ce que ça veut dire pourtant ? On a fait des évaluations là-dessus et on sait que si on fait plus de langues mais moins de français et que c'est les plus faibles qui en pâtiront. On sait aussi que finalement, c'est pas très efficace par rapport à ce qu'ils savent après, mais bon ! Là est une question d'arbitrage : qu'est-ce qu'on veut ? Est-ce qu'on admet qu'ils soient moins bons en français parce qu'on pense que c'est quand même mieux ? Tout cela, ce sont des objectifs : c'est jamais discuté ! Au collège, il y a eu baisse des heures en français avec le temps : ce n'est pas un hasard si les profs de français sont au premier rang dans la critique de baisse de niveau etc. Les profs de maths, on les entend pas trop dire que le niveau baisse et c'est vrai qu'il ne baisse pas ! Parce qu'il y a une dérive et qui n'est jamais un choix, de petits choix…

Edwy Plenel : Les enseignants ont raison quand ils ont l'impression que les politiques les ont… la parole d'autorité des ministres n'est pas crédible, forcément !

Marie Duru-Bellat : Crédible ? Il n'y a pas beaucoup de paroles du ministre. C'est surtout ça, c'est qu'elle est surtout absente . (…) Les profs choisissent, chacun dans leur coin. C'est ça qui est dramatique : il n'y a pas de message fort ! (…) La diversité des collèges est quelque chose qui n'est pas supportable ! Quand on est a minima républicain, on ne peut pas supporter ça, parce que vraiment le système éclate là ! Y a une vraie urgence à faire quelque chose de ce côté là et le silence du politique n'est vraiment pas supportable. Il est aussi suicidaire. On peut laisser dériver les choses comme ça mais, à ce moment là, les républicains, c'est de la pure hypocrisie…

(…)
Edwy Plenel : Il nous reste une minute…

Didier Dacunha-Castelle : Comme il nous reste une minute, moi, ce que je voudrais dire, c'est que les hommes politiques ne peuvent faire qu'une chose dans l'Education nationale c'est ajouter des structures. Chevènement a fait les bacs professionnels, c'est excellent ! Les ministres de droite ont créé les IUT… Il est impossible d'enlever quelque chose et donc impossible de construire, car si l'on ajoute, il faut enlever ! Parce que l'on se heurte là à des corporatismes et c'est pour cela qu'il faut passer par le parlement. Il faut tout mettre à plat. Si on ne met pas tout à plat, on n'arrivera pas à reconstruire une école de la maternelle à l'université. Il faut passer par le politique.

Edwy Plenel : Et vous, quel conseil vous donneriez à Jack Lang ?

Marie Duru-Bellat : C'est pas que je donnerais un conseil, mais il ne faut pas se restreindre au milieu des enseignants et s'appuyer sur la réalité. Ce qui a été frappant pendant " l'ère Allègre ", c'est l'accumulation de polémiques ridicules. L'école française ne va pas si mal ! (…) Tous les étrangers nous envient notre système. Les comparaisons internationales ne sont pas catastrophiques, donc il faut s'appuyer sur la réalité, garder raison. Là on a eu beaucoup de polémiques complètement folles. Il est temps de changer de style, je crois !

Edwy Plenel : Vive l'école qui est notre bien commun ; c'est aussi la promotion, le savoir, les connaissances, c'est notre bien commun. Bienvenue sur les dernières nouvelles de la chaîne info !

Transcription partielle de Bruno Ferrand, le 10 septembre 2000.

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