Programmes 2002, méthodes de lecture, extraits.


2.3 Deux manières d'identifier les mots

Pour identifier un mot, le lecteur doit relier une information visuelle (le mot écrit) à un savoir déjà acquis du fait de l'apprentissage de la parole : l'image acoustique de ce mot (la représentation des phonèmes qui le constituent) et sa (ou ses) signification(s). Deux manières de parvenir à ce résultat sont disponibles : la voie directe et la voie indirecte. L'apprenti lecteur doit apprendre à se servir efficacement de l'une et de l'autre. Elles se consolident mutuellement par leur utilisation fréquente et sont renforcées par toutes les activités d'écriture.

Identification des mots par la voie directe (lecture courante)

Ce type d'identification est possible si le lecteur dispose déjà, dans sa mémoire, d'une image orthographique du mot. Dans ce cas, le mot est quasi instantanément reconnu, à la fois visuellement, auditivement et sémantiquement. On sait aujourd'hui que le lecteur ne s'appuie pas sur la silhouette du mot pour l'identifier, mais sur la perception très rapide des lettres qui le composent.

Identification des mots par la voie indirecte (déchiffrage)

On peut aussi retrouver un mot dont on n'a pas mémorisé l'image orthographique en recourant à la voie indirecte, c'est-à-dire à son déchiffrage. Dans ce cas, les lettres sont assemblées pour constituer des syllabes prononçables, le mot est prononcé et comparé aux mots proches dont on a déjà l'image auditive dans la mémoire. Les écarts importants qui existent en français entre syllabe écrite et syllabe orale rendent souvent cette identification délicate.

2.4 Apprendre à identifier les mots par la voie indirecte (déchiffrer)

Pour pouvoir identifier les mots par la voie indirecte, les élèves de l'école élémentaire, qui ont commencé à comprendre la manière dont fonctionne le code alphabétique, doivent aussi mémoriser les relations entre graphèmes et phonèmes et apprendre à les utiliser.

La plupart des méthodes proposent deux types d'abord complémentaires ; analyse de mots entiers en unités plus petites référées à des connaissances déjà acquises ; synthèse, à partir de leurs constituants, de syllabes ou de mots réels ou inventés. Les deux types d'activités sont travaillés en relation avec de nombreuses situations d'écriture permettant de renforcer la mise en mémoire de ces relations.

Analyse du matériel graphique et synthèse des unités identifiées

Dans le premier cas, chaque mot présenté est analysé par analogie avec les mots repères (dans "manteau", je vois le "man" de "maman", le "t" de "table", le "eau" de "beau"). Chaque unité graphique repérée, quelle que soit sa taille, peut être écrite ou épelée et a une valeur phonétique non ambiguë (je prononce [mã], [tø] ou [o]).

Dans un deuxième temps, le matériel sonore ainsi retrouvé doit être rassemblé, syllabe après syllabe, pour constituer un mot renvoyant à une image acoustique disponible dans la mémoire de l'élève. La principale difficulté réside dans l'assemblage de la syllabe à partir des phonèmes qui la constituent : le passage de [tø] et [o] à [to] est difficile à découvrir sans guidage et nécessite le plus souvent que l'équivalence soit apprise.

D'où la nécessité d'exercer les élèves à la démarche de synthèse par la mémorisation des principaux assemblages syllabiques entre voyelles et consonnes dans les différentes combinaisons possibles. C'est par l'écriture, plus encore que par la lecture, que ces régularités sont mises en mémoire : production de syllabes à partir d'une consonne ou d'une voyelle, écriture de syllabes sous dictée, découpage d'un mot écrit régulier en syllabes...

[…]

Programmation des activités

Ces apprentissages sont au cœur de la plupart des méthodes d'enseignement de la lecture. La qualité des programmations proposées doit guider le choix des enseignants. Certains laissent se constituer ces connaissances au hasard des rencontres et des réactions des élèves (c'est le cas de la méthode "naturelle" proposée par Célestin Freinet), d'autres (en particulier les livrets proposés par les éditeurs) les organisent selon une progression qui combine complexité croissante des activités mises en jeu tant dans l'analyse que dans la synthèse et complexité croissante des relations entre graphèmes et phonèmes. Dans les deux cas, il importe d'aider les élèves à mémoriser ces informations, donc à leur permettre de les structurer de manière rigoureuse et de les réviser fréquemment.

Certaines méthodes proposent de faire l'économie de l'apprentissage de la reconnaissance indirecte des mots (méthodes globales, méthodes idéo-visuelles...) de manière à éviter que certains élèves ne s'enferment dans cette phase de déchiffrage réputée peu efficace pour le traitement de la signification des textes. On considère souvent aujourd'hui que ce choix comporte plus d'inconvénients que d'avantages : il ne permet pas d'arriver rapidement à une reconnaissance orthographique directe des mots, trop longtemps appréhendés par leur signification dans le contexte qui est le leur plutôt que lus. On peut toutefois considérer que la plupart de ces méthodes, par le très large usage qu'elles font des activités d'écriture, parviennent aussi à enseigner, de manière moins explicite, les relations entre graphèmes et phonèmes. Il appartient aux enseignants de choisir la voie qui conduit le plus efficacement tous les élèves à toutes les compétences fixées par les programmes (les compétences de déchiffrage de mots inconnus en font partie).

2.5 Apprendre à identifier des mots par la voie directe

À la fin du cycle des apprentissages fondamentaux, les élèves doivent utiliser de manière privilégiée la voie directe. Elle leur permet une identification quasi instantanée des mots et facilite donc la compréhension en soulageant la mémoire d'une part, en permettant une prise d'information plus sûre et plus complète de l'autre. (…)

B.0. 2002 - Cycle des apprentissages fondamentaux (cycle 2)

 

 

4.6 Découvrir le fonctionnement du code écrit

Si l'apprentissage explicite de la lecture ne fait pas partie du programme de l'école maternelle, la découverte du fonctionnement du code écrit en est un objectif important. On peut considérer que, dès quatre ans, la plupart des enfants ont commencé à s'intéresser aux écritures qui les entourent.

Ils doivent être attentifs à trois phénomènes différents et s'en approprier les mécanismes. La première conquête est certainement celle qui permet de comprendre que le mot écrit renvoie au mot oral et non à la personne ou à l'objet qu'il représente et que, en conséquence, les caractéristiques d'un mot écrit, sa longueur par exemple, sont en relation avec les caractéristiques orales du mot et non avec sa signification ("train" n'est pas un mot plus long que "bicyclette"). Les imagiers peuvent être d'excellents supports pour de fréquents débats sur ce qui est écrit dans un mot et pour des comparaisons portant sur la relation entre ce qui est écrit et la longueur orale du mot.

La deuxième conquête est celle qui permet de prendre conscience que l'écrit est composé de mots séparés les uns des autres, alors que l'oral est fait d'énoncés continus, rythmés par des coupures qui ne correspondent que rarement avec les frontières des mots. On peut aider l'enfant à faire ce nouveau pas en écrivant devant lui, tout en disant à haute voix ce qu'on écrit, ou encore en lui demandant où se trouve tel ou tel mot d'une phrase qu'on vient de lui lire.

La troisième conquête, très progressive, est celle qui éclaire le mécanisme d'encodage de l'écriture alphabétique : il met en relation des unités sonores et des unités graphiques. Le prénom est souvent le support privilégié d'une première prise de conscience. Il en est de même pour les mots qui reviennent le plus souvent dans l'activité de la classe, comme les jours de la semaine. L'enfant les reconnaît d'abord de manière approximative, sans être capable de savoir comment les lettres qu'ils contiennent jouent leur rôle. Lorsqu'il tente de les reproduire, il invente des systèmes d'écriture successifs. Il est important de lui laisser le temps de construire cette connaissance du principe alphabétique et de lui en donner les moyens. Trouver comment l'on pourrait écrire un mot simple en se servant des matériaux qui ont été progressivement constitués dans la vie de la classe est l'aboutissement de ces "ateliers d'écriture".

B.0. 2002 - École maternelle

 

 

FICHE A5 L’élève est-il capable de lire seul et de comprendre un court texte dont le thème est connu et le sens " porté " par des mots qu’il devrait être en mesure de reconnaître ?

Compétences et

tâches associées

Questions à se poser

face à une difficulté

Suggestions de travail

Après lecture autonome, montrer que la compréhension d’un court texte dont le thème est connu et le sens " porté " par des mots déjà travaillés est acquise.

L’élève élabore-t-il un sens fragmentaire ou approximatif à partir d’extrapolations ?

Proposer une aide individuelle pour :

– valider ce qui est exact ;

– contraindre l’élève à traiter la totalité des informations;

– lui faire comparer sa première élaboration avec la seconde et lui faire prendre conscience de l’importance de respecter ce qui est écrit.

Lui faire prendre conscience de sa manière spontanée de lire en lui en montrant les limites.

L’élève se concentre-t-il exclusivement sur le déchiffrage ?

Fractionner la tâche pour :

– l’aider à construire progressivement des blocs de sens, les faire mémoriser et redire (utiliser des outils de masquage : caches, fenêtres…) ;

– faire prédire une suite possible en cours de lecture ;

– faire vérifier par retour au texte.

Concevoir ces aides de manière régulière en ayant soin d’augmenter progressivement la difficulté (longueur des textes à lire, complexité sémantique et syntaxique).

Se contente-t-il de repérer les mots reconnus sans chercher à construire du sens ?

Exemple – Il échantillonne le texte, il va à la pêche aux mots.

Faire utiliser dans un échange oral tous les indices disponibles pour aider les élèves à émettre des hypothèses.

Instaurer un temps d’échanges afin de valider les hypothèses.

Revenir au texte lors de synthèses partielles systématiques afin de vérifier le sens construit.

Entraîner les élèves à adopter des réflexes de retours en arrière pour vérifier s’ils ont bien compris.

A-t-il des difficultés à reconnaître les mots ? A-t-il mémorisé les mots censés être connus ? Sait-il utiliser l’affichage ?

Arrive-t-il à décomposer les mots en syllabes ?

A-t-il compris le principe de la combinatoire lui permettant de lire les mots qu’il n’a pas mémorisés ?

Travailler sur le mot :

– ordonner la constitution du capital-mots ;

– insister sur la forme orthographique et non sur l’image globale du mot ;

– exercer les élèves au découpage de mots en syllabes :

produire des syllabes à partir d’une consonne ou d’une voyelle, écrire des syllabes sous dictée,

découper un mot écrit régulier en syllabes (puiser prioritairement dans le stock de mots connus),

recourir à l’écriture pour faciliter la lecture.

Lire au CP – Repérer les difficultés pour mieux agir, CNDP, 2003.