Communiqué de presse du 19 décembre 2006

Pour la suppression du sujet d’invention.

Le BO du 14 décembre a modifié, sans aucune consultation des professeurs, les épreuves écrites anticipées de français au baccalauréat. Le remaniement concerne la définition du sujet dit d’" invention " dont les défauts, déjà dénoncés par le collectif Sauver les lettres, sont accentués.

Le texte en effet présente une contradiction ouvrant la porte à toutes les interprétations. La précision de 2001 " en aucun cas on ne demande, le jour de l'examen, l'écriture de textes de pure imagination, libre et sans contrainte " a disparu, ce qui, en dépit de " consignes claires et explicites " pourra rendre l’évaluation encore plus délicate et subjective. Ce sujet est donc encore moins adapté à un examen dont la première qualité doit être une évaluation aussi rigoureuse que possible.

D’autre part et plus encore qu’auparavant, le niveau de l’épreuve n’a aucun rapport avec celui que l’on attend au baccalauréat, premier degré de l’enseignement supérieur. Au moment où les universités multiplient les alertes sur le taux d’échec des étudiants en premier cycle, puisque le baccalauréat ne garantit absolument plus la maîtrise des connaissances ni des méthodes indispensables pour aborder des études supérieures, il est irresponsable d’importer du collège une épreuve dont personne ne voit quelles aptitudes attendues chez un futur étudiant elle cherche à vérifier. Les catégories littéraires de lycée que le sujet pouvait illustrer se trouvent privées de l’" essai ", et la limite du " cadre argumentatif " dans les séries autres que la série L est maintenant franchie. Le second type de rédaction, qui relève du " genre narratif ", prévoit le même genre d’exercices qu’en quatrième ou troisième : " des transpositions : changements de genre, de registre, ou de point de vue ; ou des amplifications : insertion d’une description ou d’un dialogue dans un récit, poursuite d’un texte, développement d’une ellipse narrative ". Le sujet ainsi modifié ne permet donc d'évaluer qu’un faible niveau de fin de collège, dont il reprend d’ailleurs le programme : la connaissance du " genre narratif " et du " cadre argumentatif ".

La différence d’exigence entre cette rédaction et les deux autres sujets, le commentaire de texte et la dissertation, exercices indispensables pour aborder la philosophie en terminale, n’en est que plus criante. Introduite en 2002 pour améliorer les résultats du baccalauréat qui baissaient, l’" invention " transforme l’épreuve anticipée de français en supercherie.

La réintroduction du roman, " genre narratif ", dans le programme de première, accueillie avec soulagement en novembre dernier parce qu’elle permettait de nouveau, après six ans de vaches maigres, d’étudier Stendhal ou Flaubert en première, était en fait un fusil à deux coups : après l’amélioration du programme, le coup de pied de l’âne de l’épreuve écrite.

Sauver les lettres rappelle ses demandes pour les épreuves du baccalauréat : des sujets clairs, vérifiant l’acquisition de méthodes et de connaissances ainsi qu’une maîtrise de la langue au service d’une pensée critique autonome. Les deux exercices de commentaire et de dissertation suffisent à cette vérification, et sont les seuls qui préparent véritablement aux exigences de l’enseignement supérieur.

Plus que jamais, Sauver les lettres demande donc la suppression pure et simple du sujet d’invention.

Collectif Sauver les lettres.