Le projet de loi Fillon : un "reader’s digest "

http://www.loi.ecole.gouv.fr/documents/uploaded/projetdeloi120105.pdf


I. Une modification des finalités de l'école

Cf. rapport annexé : "La nouvelle loi d'orientation a pour ambition de répondre aux évolutions de la société française et de l'école depuis ces quinze dernières années (…) elle veut aussi inscrire l'effort de l'éducation nationale dans le cadre des engagements européens de la France."

Pour répondre à la montée de la violence et des communautarismes, l'accent est mis sur la moralisation de la jeunesse, d'autant que la transmission des connaissances académiques est réduite (réduction du temps scolaire, marginalisation de nombreuses matières dès le collège…voir infra)

cf. article 2 + rapport annexé

"La Nation fixe comme mission première à l'école de faire partager aux élèves les valeurs de la République." "L'école n'a pas uniquement pour rôle de dispenser des connaissances que l'évolution rapide des savoirs et des technologies risque de rendre obsolètes (…) ; l'Ecole doit conformément à une tradition qui remonte à ses origines mêmes, transmettre aux élèves les valeurs morales qui fondent la vie en société et rendent possible l'exercice de la citoyenneté". Fillon semble oublier qu'aux origines de l'école, il y avait les curés !

C'est ainsi qu'au brevet des collèges est introduite une note de "vie scolaire" qui prend en compte l'assiduité, le respect du règlement intérieur et "l'engagement dans la vie de l'établissement" : autrement dit, même nul en maths, si on a participé à la vente des croissants pour les victimes du tsunami, on est un bon petit gars ! On confond une fois de plus le respect des valeurs républicaines et l'adhésion irréfléchie aux tics de la société boy-scout…

L'objectif est celui de la "réussite de tous les élèves", c'est-à-dire "l'acquisition par 100% des élèves d'un diplôme ou une qualification reconnue" (80 % d'une classe d'âge au bac + 50 % à un diplôme post-bac) : on est toujours dans les délires quantitatifs qui ne prennent pas en compte la qualité des diplômes délivrés. Va-t-on pour parvenir à ces chiffres brader les diplômes du supérieur comme on a bradé le bac ? cf. article 4 + rapport annexé.

Il faut davantage mettre en phase l'école et les besoins de l'économie : cf. rapport annexé

On se fixe l'objectif d'"apporter à tous les jeunes le niveau de formation nécessaire à l'obtention d'un emploi correspondant aux besoins économiques de la France (…)" ; "il est indispensable de trouver une nouvelle relation entre la connaissance et l'économie, dans la perspective du processus de Lisbonne. (…) L'école doit favoriser le rapprochement de la culture et de l'économie (…)" ; "il convient de généraliser les initiatives qui font connaître l'entreprise aux jeunes"…

Bref, on encourage officiellement des dérives qu'on connaît déjà d'intervention des entreprises en milieu scolaire (Les "masters de l'économie"…)

Au collège, on insiste sur la découverte du monde de l'entreprise (voir infra). Au lycée, certaines filières générales semblent se tertiariser (ES : introduction de la gestion d'entreprise…). L'apprentissage de deux langues vivantes devient obligatoire, la première dès le CE2 (puis CE1), la deuxième dès la cinquième. L'engagement est pris d'augmenter la proportion d'élèves germanistes de 20 % en cinq ans. Mais qu'on s'entende bien : on ne parle pas de lettres ni de culture, il faut privilégier "les compétences de compréhension et d'expression", d'ailleurs les élèves seront regroupés en groupes de "compétences" définies dans le "cadre européen commun de référence".


II. Une diminution des exigences et des contenus qui s'accompagne d'une éducation à plusieurs vitesses

Est défini "l"ensemble des connaissances et compétences indispensables" à acquérir obligatoirement à la fin de la scolarité obligatoire : cf. article 6 + rapport annexé
- "la maîtrise de la langue française
- la maîtrise des principaux éléments de mathématiques
- une culture humaniste et scientifique permettant l'exercice de la citoyenneté
- la pratique d'au moins une langue vivante étrangère
- la maîtrise des techniques usuelles de l'information et de la communication"

Le contenu précis de ce socle commun sera fixé par décret, sur avis d'un Haut Conseil de l'Education créé à cet effet. "Le contenu de ce socle ne se substitue pas aux programmes de l'école et du collège, mais il en fonde les objectifs pour définir ce qu'aucun élève est censé ignorer à la fin de la scolarité obligatoire". De fait, à voir la pauvreté de ce socle, il n'existe guère plus de différence entre ce qu'on enseignera à l'école élémentaire, et ce qu'on enseignera au collège…d'ailleurs c'est explicite : le collège s'inscrit "dans la continuité des enseignements de l'école primaire".

On dégraissera aussi les enseignements au lycée : "Il est souhaitable de réduire le nombre d'options au lycée et de tendre vers un plafonnement de l'horaire maximal de travail des lycéens". En seconde les élèves choisiront un seul enseignement de spécialisation et, éventuellement, deux options facultatives. Cela menace directement l'enseignement de SES -les syndicats estiment à 70% la perte prévisible d'effectifs d'élèves ! -, ainsi que la troisième langue vivante, l’histoire des arts et les langues anciennes – les sections d’italien, russe, chinois etc., latin et grec disparaîtront dès lors qu’elles seront moins choisies et donc considérées comme « à faibles effectifs », pour lesquels aucun seuil n’est fixé. Ces suppressions programmées concernent des sections rattachées à des épreuves de la filière L, dont on voit ainsi qu’elle est condamnée à terme, et écrètent la spécialisation de la filière ES, menacée elle aussi par une fusion avec les formations tertiaires.

Ces dégraissages ont en effet un second objectif : annuler progressivement la distinction entre sections générales et technologiques : la seconde langue vivante sera de fait le seul « enseignement de détermination » du lycéen, ce qui efface justement la détermination ! Les autres options étant facultatives, l’orientation de fin de troisième ne pourra plus conduire explicitement les élèves vers la voie technologique et ruinera à terme des formations importantes. On se dirige tout droit vers un « tronc commun » de lycée à faible contenu, en laissant au post-bac le soin de formations déterminées, spécialisées, éventuellement exigeantes si elles peuvent encore l’être.

C’est auparavant que la seconde langue vivante aura joué un rôle discriminant : les élèves qui en fin de 6ème n’auront pas maîtrise le « socle commun » n’auront pas accès en 5ème à une seconde langue, ce qui limite singulièrement les annonces fracassantes du ministre sur les langues vivantes, dont il travaille au contraire à la suppression.

Les dispositifs de dédoublement des classes seront "rééxaminés en fonction de leur intérêt pédagogique" (=comprendre supprimés !), sauf en langues vivantes. On peut donc s’attendre à voir disparaître les modules de seconde, déjà contestés par l’inspection générale pour leur assimilation abusive (!) à des dédoublements.

Est posé le principe d'une diversification importante des parcours des élèves dès le collège, en fonction de leur rapidité d'acquisition des connaissances : cf. rapport annexé.

Pour les bons élèves : "les collèges veilleront à permettre des approfondissements dans les disciplines fondamentales ou des diversifications en particulier dans des disciplines telles que les langues anciennes." Comment concilier cette marginalisation des élèves étudiant les langues anciennes avec l'objectif d'en augmenter de 10 % les effectifs ? On connaît l'allure à laquelle les fermetures de sections de latin et de grec se poursuivent partout en France…

Pour les mauvais élèves : on passe un contrat individuel de réussite éducative" (cf. infra) et leur temps de travail "sera aménagé de façon à leur permettre à la fois de progresser dans les matières où ils rencontrent des difficultés, et de retrouver confiance en eux en développant leurs aptitudes dans une matière où ils sont en situation de réussite".

Le contenu des enseignements choisis sera donc très variable, et fonction des "aptitudes et des intérêts" des élèves (cf. article 18), comme si ces données étaient naturelles et intangibles… Concrètement, on voit comment cela se traduira : les élèves défavorisés n'auront pas accès à certaines matières qui seront de fait réservées à l'élite (langues anciennes). Comment ne pas y voir une orientation précoce des élèves en difficulté vers des filières techniques ou professionnelles ? Et l’oubli volontaire, parce que coûteux, de la valeur réparatrice, pour les élèves « perdus », de l’accès à d’autres matières que les « fondements » : le « latin-grec thérapeutique » avait pourtant montré ses vertus.

Bien sûr, le souci de ne pas envoyer au lycée général des élèves qui n'ont pas le niveau pour en suivre l'enseignement est louable. Mais en l'absence de réforme de l'école primaire qui actuellement envoie 25 % d'illettrés au collège (maintien de programmes vides et de méthodes inefficaces comme la "transversalité" du français, maintien du saupoudrage d'activités de "projet d’école" et de langue étrangère…), alors même qu'on ne conçoit l'aide aux élèves en difficulté que sous la forme de "contrats individuels de réussite" bidon (voir infra), alors qu'on ne revoit pas à la hausse les horaires attribués aux disciplines fondamentales, on ne créera pas les conditions pour que cette inadaptation au lycée ne soit pas déterminée par le milieu socio-culturel de l'élève…

Vers des diplômes "maison" : cf. articles 16, 18 et rapport annexé.

Dans un objectif de "modernisation" des diplômes (comprendre réduction des coûts !), "il peut être tenu compte des résultats du contrôle continu, des résultats des contrôles en cours de formation, des résultats d'examen terminaux et de la validation des acquis de l'expérience". Mais concrètement, cela reste flou …

Le brevet sera à la carte : hormis les trois épreuves écrites nationales (lesquelles ?), il prendra en compte, "selon des choix propres aux élèves, les autres enseignements et activités d'approfondissement et de diversification" et il "inclut une note de vie scolaire" (voir supra).

Le bac ne comportera plus que comportera 6 épreuves terminales. On ignore encore lesquelles.

On connaît tous les dangers de cette introduction du contrôle en cours de formation (désorganisation de l'année scolaire) ou du contrôle continu (diplômes à valeur variable d'un établissement à l'autre, pression insupportable sur les enseignants qui délivrent les notes…).

Bac et brevet devront inclure le "B2i" (brevet d'informatique), dont le pourcentage de réussite est d'ores et déjà fixé à 80% !

Un grand principe : la déqualification.

Les finalités des trois voies du lycée sont revues à la baisse.

- La voie professionnelle est soumise aux commandes de l’emploi. Le bac professionnel qui se prépare en quatre ans actuellement sera passé après trois ans seulement par «les élèves en ayant la capacité », alors que ces élèves pouvaient il y a peu, par le biais de la première d’adaptation, rejoindre une filière technologique. Certains brevets de technicien seront reconvertis en bacs professionnels, les BEP qui ouvrent directement sur la vie professionnelle transformés en CAP de moindre niveau salarial à l’embauche ; seuls les BEP de services médicaux ou sociaux seront préservés, en fonction des besoins importants. La déqualification est méthodiquement organisée, faisant descendre chaque diplôme au niveau inférieur, avec les conséquences à l’embauche

- Dans la voie technologique les séries sont regroupées, celles qui ouvrent directement sur la vie professionnelle sont transformées en bacs professionnels, les autres « rénovées »( !)progressivement selon le même schéma de déqualification, sauf les séries médico-sociales, valorisées comme le BEP correspondant.

- Les séries générales L et ES sont tertiarisées, la série littéraire vers la communication, la série économique vers la gestion, au détriment de la formation généraliste…


III. Orientation et suivi des élèves : vers le renforcement des déterminismes socio-culturels

Que se passe-t-il si l'élève est en difficulté au cours du cursus ?

Il est passé un "contrat individuel de réussite éducative" entre les parents de l'élève, les professeurs et le chef d'établissement, qui détermine les modalités de soutien sur temps scolaire ou hors temps scolaire (pris en charge par qui ? des professeurs en heures supplémentaire ? des associations extérieures ?), sous "la forme d'un horaire spécifique en groupes restreints". Les moyens alloués correspondent pour partie à un redéploiement de ce qui existe déjà (RASED à l'école primaire, IDD au collège). Les moyens spécifiques alloués au collège le seront en fonction du nombre d'élèves en difficulté repérés lors des évaluations. Ce "contrat" peut prévenir ou accompagner la décision de redoublement, qui relèvera de la décision du chef d'établissement, après dialogue avec les parents. Cette logique du contrat est perverse : elle rejette la responsabilité de l'échec de l'élève sur les individus et dédouane l'institution de ses carences. Ce n'est que poudre aux yeux : seuls des dispositifs d'aide précoce (multiplication des classes spécialisées à l'école primaire) et généralisés (établir des études surveillées dans chaque collège), appuyés par le travail des assistants sociaux et des psychologues scolaires qui actuellement ne sont plus assez nombreux ni disponibles, pourraient s'avérer efficaces sur l'échec scolaire…mais bien sûr, cela coûte trop cher !

L'orientation est définie comme "la possibilité d'aller au plus loin de (ses) capacités et de développer une forme de talent, quel qu'en soit le domaine d'exercice". Encore le bobard des "talents"… enfin, ne rêvons pas, l'épanouissement personnel c'est bien joli, mais il faut surtout tenir compte dans l'orientation "des perspectives professionnelles liées aux besoins prévisibles de la société et de l'économie". cf. article 13 et rapport annexé.

Il est donc prévu de développer la "quatrième en alternance". La troisième redevient un palier d'orientation fort avec une option de 6 heures hebdomadaires de "découverte professionnelle".

En fin de troisième, si le "socle" n'est pas acquis : cela reste flou… Les résultats du brevet, qui se déroulera avant le conseil de classe, seront pris en compte. Soit on propose un redoublement, soit l'élève pourra s'engager dans une voie professionnelle en suivant un complément d'enseignement, et il "sera établi un bilan personnalisé de fin de scolarité obligatoire"…c'est-à-dire qu'on le pousse dehors ! D'ailleurs le projet de loi fixe une augmentation de 50 % des effectifs d'apprentis dans les formations en apprentissage… mais en prévoyant que les patrons ne prendront pas tous les apprentis en puissance : les missions des professeurs sont étendues… "aux formations par apprentissage" (article 24 de la nouvelle loi).


IV. Formation, recrutement et statut des professeurs : vers la déqualification.

La formation initiale et le recrutement :

Les concours deviennent "nationaux à affectation académique".

Les concours restent nationaux, mais assortis d'une certification complémentaire en lettres, langues ou mathématiques qui sera validée après formation complémentaire. On prépare ainsi la bivalence des professeurs. Le concours de professeur des écoles comportera une épreuve obligatoire orale de langue vivante pour assurer l'enseignement d'une langue étrangère à l'école primaire.

L'affectation est régionalisée : les lauréats des concours choisissent leur académie d'affectation pour leur stage et leurs premières années de titulaires.

On développera au maximum le recrutement des gens issus du monde professionnel privé (troisièmes concours et professeurs "associés"). Bonjour le n'importe quoi ! Les professeurs de LP (déjà bivalents) pourront enseigner en sixième, lorsque le démantèlement de leurs établissements aura été effectué et qu’il faudra les réaffecter..., préparant ainsi la bivalence de tous.

Les missions nouvelles : on charge la mule !

Les professeurs "contribuent à la continuité de l'enseignement sous l'autorité du chef d'établissement en assurant des enseignements complémentaires" cf. article 24 et rapport annexé. Cela se traduit par l'obligation d'assurer au maximum 72 heures supplémentaires par an pour remplacer les collègues absents même s’ils sont d’une autre matière, la formule « enseignements complémentaires » donnant l’élasticité nécessaire à tous les arrangements ou mises en demeure imaginables.

Les professeurs doivent aussi assurer le soutien personnalisé aux élèves en difficulté (sous quelle forme ? mystère…)

Le professeur principal, en plus de ses charges habituelles, "veille à l'élaboration et au suivi des contrats individuels de réussite éducative".

Last but not least, comme l'annonçait déjà Luc Ferry, l'accueil des élèves handicapés fera désormais partie de leur mission, puisque l'école doit intégrer les handicapés, "quelle que soit la nature du handicap, et permettre leur scolarisation en priorité dans l'école ou l'établissement scolaire le plus proche de leur domicile", bien sûr à peu de frais (création d'UPI au sein d'établissements classiques plutôt que d'écoles spécialisées, et vernis de formation pour les enseignants, invités à suivre des "formations spécialisées"… à quelles conditions ! voir infra). C'est clairement se foutre de la gueule des handicapés, et tromper bassement les aspirations de leurs parents.

Formation continue, adieu ! : chaque prof reçoit un crédit de 20 heures/an, prioritairement en-dehors des heures de cours…et pas toujours rémunérées ! On se demande comment, en procédant ainsi, le ministre compte augmenter de 20 % le nombre d'enseignants en formation continue ! Cette formation continue peut être organisée au niveau local (?) par les conseils pédagogiques, mais c'est bien flou…


V. Le fonctionnement de l'Education nationale : triomphe de la politique managériale et de la décentralisation

Cf. rapport annexé.

Obsession du coût et de l'évaluation du système : "On constate une stagnation depuis dix ans environ des résultats de notre système scolaire malgré la baisse des effectifs des élèves et l'accroissement continu des moyens humains et financiers qui lui ont été consacrés". Il s'agit donc d'"améliorer l'efficacité des établissements scolaires", et pour cela de "donner une plus grande responsabilité aux établissements dans la gestion financière et humaine de leurs moyens au service de leurs priorités pédagogiques", par le biais de la LOLF (Loi Organique relative aux Lois de Finances) : un contrat fixant les objectifs pédagogiques sera signé entre chaque académie et les établissements. "La réflexion sur les différentes formes d'évaluation de notre système éducatif, depuis l'évaluation des élèves jusqu'à celle des académies en passant par celle des personnels et des établissements, est capitale". Les moyens seront donc donnés en fonction des résultats : vive les évaluations bidon ou maison !

Pilotage par le haut :

Le Haut Conseil de l'éducation est créé pour remplacer à la fois le Conseil Supérieur de l'éducation et le Conseil national des programmes : organe consultatif "indépendant", il donne son avis au ministre sur les programmes, la pédagogie, l'organisation du système… et est chargé d'évaluer les résultats de ce même système éducatif "au regard des objectifs de la maîtrise du socle".

Il est composé de 9 membres (3 nommés par le Président de la République, 2 par le Président de l'Assemblée nationale, 2 par le Président du Sénat, 2 par le Président du Conseil économique et social), et est assisté par une équipe d'"experts" mis à sa disposition par le ministre (très indépendant, donc…)

Le ministère "fixe les grands objectifs qui garantissent la cohérence nationale de la politique éducative, répartit les moyens en personnels et en crédits, vérifie et évalue leur utilisation" ; en fonction de cette donne, les académies élaborent leurs propres objectifs (à faire approuver par le ministre) et "construisent leur budget opérationnel de programme".

"Pilotage" local : vers le règne des petits chefs

Une "ouverture" suspecte sur le monde extérieur …

Il semble enfin que l'ouverture de l'école sur l'extérieur prônée à la fin du rapport annexé corresponde à une volonté de se décharger sur les parents, les élus, les associations, les entreprises, de toutes les défaillances de l'école : à cet égard, la "nécessaire continuité éducative entre le temps scolaire, le temps périscolaire et le temps familial" est suspecte, de même que l'éloge de la "diversité" en matière d'enseignement des arts, qui comprendra des "dispositifs d'action culturelle et des approches croisées" et des "partenariats dans lesquels les structures artistiques et culturelles et les collectivités territoriales ont une implication de plus en plus forte" … Bref, Fillon fait d'une pierre deux coups : il sabre le budget de l'Education nationale et règle la question des intermittents du spectacle !


Le projet de loi d’orientation fait subir ainsi à l’école une atteinte gravissime : il installe une école à deux vitesses, appauvrit les contenus enseignés, supprime ou dénature beaucoup de matières, déqualifie systématiquement les diplômes, menace la valeur et le caractère national du baccalauréat ainsi que les statuts nationaux d’enseignants qualifiés et spécialisés, installe une culture managériale de résultats, supprime des milliers de postes d’enseignants et diminue donc l’encadrement et la qualité de l’école, au prétexte qu’elle coûte trop cher à la nation.

Méprisant finalement l’instruction, la soumettant aux diktats étroits de l’emploi, et n’assurant aux élèves, dans l’enseignement public, qu’une « certification » qui risque de devenir une forme sans contenu, la nouvelle loi d’orientation n’est qu’un prétexte commode pour faire des économies à court terme, et à long terme pour liquider définitivement, selon les directives européennes, le service d’un enseignement public de qualité pour tous.


Fanny Capel

01/2004