Cinq questions sur l’oral de l’ÉAF

Avec l'aimable autorisation de l'auteur et de L'École des lettres.


      Par un paradoxe peut-être inhérent au « genre », les textes officiels définissant les épreuves de français au lycée sont volontiers déceptifs : le désir de ne pas se montrer trop « prescriptif » et de ménager la liberté des professeurs conduit à des rédactions allusives qui exigent du lecteur des interprétations quand il souhaiterait simplement être informé. La note de service 2001-117 du 28 juin 2001 (BOÉN n°26 du 28 juin 2001) sur les nouvelles épreuves de français du baccalauréat échappe d’autant moins à la règle qu’elle constitue manifestement un compromis entre des positions qui se sont opposées dans les discussions de ces derniers mois. Aussi n’est-il pas inutile de signaler les nouveautés et les ambiguïtés de ce texte, bref de tenter d’y voir clair.
      Nous nous en tiendrons à l’oral, sujet particulièrement sensible qui a vu s’affronter deux courants : ceux qui souhaitent en finir avec le bachotage et évaluer l’autonomie du candidat en l’interrogeant sur un texte inconnu (mais ressortissant à un objet d’étude figurant sur leur liste) et ceux qui considèrent que le candidat doit être jugé sur sa capacité à expliquer des textes travaillés en classe, l’entretien et le découpage (éventuel) dans ce texte d’un extrait d’une quinzaine de lignes ou de vers suffisant à déjouer la simple récitation d’une explication apprise.
      Parmi les nouveautés, signalons l’allongement du temps de préparation à 40 minutes, la disparition de la limite des quinze lignes, l’introduction d’une question orientant l’étude du candidat et la possibilité pour l’examinateur de lui donner un deuxième texte qu’il ne connaît pas mais « très proche » de celui tiré de sa liste (avec ces deux derniers points, on espère éviter la récitation d’un cours). On revient aussi à une notation séparée des deux parties de l’épreuve (10 points chacune).
      Les ambiguïtés et les difficultés sont nombreuses. Tout d’abord, sur le plan pratique, pour que l’examinateur pose une question pertinente « qui permette au candidat d’organiser et d’orienter [l’]étude » du texte qu’on lui propose, il faudrait qu’on lui communique quelques jours avant l’oral les listes (éventuellement les textes rares) des candidats.

Question 1. – Les rectorats et le SIEC auront-ils les moyens de communiquer ces listes ? Une assurance formelle sur ce point est d’autant plus nécessaire que l’examinateur devra être en mesure de proposer un texte complémentaire conforme à la liste du candidat (voir ci-dessous). D’autre part, la note de service ne précise pas explicitement si le candidat sera interrogé sur un extrait déjà étudié en classe : « un extrait choisi parmi les lectures répertoriées », cela peut être un passage non étudié d’une œuvre intégrale figurant sur la liste du candidat, rebaptisée « "descriptif des lectures et activités" réalisées pendant l’année ».

Question 2. – Ce « descriptif » doit-il indiquer les extraits des œuvres intégrales étudiées, comme le fait la liste actuelle ?

Question 3. – Si oui, l’examinateur est-il tenu de choisir un de ces extraits ?

Question 4. – Si oui, doit-il procéder à un redécoupage de cet extrait, puisque la longueur de l’extrait étudié par le candidat est « délimitée par l’examinateur » ?

Question 5. – Dans la seconde partie de l’épreuve, quand il interroge le candidat sur « l’objet d’étude auquel se rattache le texte étudié », « l’examinateur peut également accompagner les questions d’un texte très proche de ceux présentés » sur sa liste.
À quel moment l’examinateur devra-t-il présenter ce nouveau texte au candidat ? Si c’est seulement au début de l’entretien, cela veut dire qu’on attend une réaction immédiate du candidat et qu’une partie des 10 minutes sera consacrée à la découverte de ce texte ; en outre, quelle serait alors la justification de l’allongement de la préparation à 40 minutes ? Si ce texte est donné en même temps que l’extrait à étudier, cela ne va-t-il pas à l’encontre de la liberté que l’on attend d’un « dialogue » entre le candidat et l’examinateur ?

Jacques Vassevière

(L'École des lettres second cycle, n°2, août 2001, p. 78-79)

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